VRS n°388 04/2012
Dossier : Environnement et démocratie: des scientifiques s’engagent
VRS n°388 04/2012L’édito de Patrick Monfort, secrétaire général du SNCS-FSU
Le monde universitaire et de la recherche scientifique, exsangue des réformes imposées
depuis le Pacte de la recherche et la LRU depuis six ans, est aujourd’hui à la croisée des
chemins. Les moyens et les emplois ne se sont pas accrus depuis 2007, malgré la promesse
de 1,8 milliard par an de plus. Le gouvernement veut présenter la démolition générale opérée
depuis 2006 dans l’enseignement supérieur et la recherche (ESR) comme une réforme à
succès sur laquelle personne ne reviendra.
Pour cela, il tente d’imposer en force les conventions des Initiatives d’excellence (IDEX),
alors que les personnels en découvrent à peine le contenu. Face à ces structures antidémocratiques,
à la veille d’échéances électorales importantes, les personnels se mobilisent
contre ce verrouillage.
Les «réformes» gouvernementales, au nom d’une supposée «excellence», détruisent
les formations et la recherche fondamentale en obligeant les territoires, les régions, les
établissements, les laboratoires et même les individus à se faire concurrence. Leur objectif
unique est d’organiser le pilotage politique et économique de l’ESR. Fonctionnant comme
des machines à exclure, l’AERES et l’ANR sont les instruments de cette conversion du secteur
public de l’ESR au néomanagement du monde entrepreneurial.
Le résultat en est un immense gaspillage d’énergies, de compétences et de moyens, un
déni de démocratie, la restauration tous azimuts du mandarinat et la création de déserts
universitaires.
Pour éviter le naufrage, il y a urgence à reconstruire. Pour cela, des signes forts doivent
être donnés à la communauté scientifique pour une autre politique. Il faut augmenter
immédiatement les soutiens de base des laboratoires, en réduisant le crédit d’impôt recherche
et en redistribuant les budgets de l’ANR non engagés. Il faut créer de l’emploi scientifique
statutaire pour supprimer le précariat scientifique qui a explosé depuis six ans. Il faut enterrer
la politique du «Grand emprunt». Un état des lieux mené démocratiquement doit permettre
d’établir la réalité des budgets engagés et des sommes réellement empruntées, pour engager
leur redistribution conformément aux besoins réels des organismes de recherche et des
universités publiques.
L’évaluation des unités des organismes de recherche doit être rendue immédiatement
au Comité national de la recherche scientifique et aux instances d’évaluation équivalentes
des autres établissements de recherche.
Une fois l’oxygène rendu aux établissements d’enseignement supérieur et de recherche,
un grand débat pourra être organisé pour réfléchir et faire des propositions, pour une autre
loi-cadre de l’ESR qui jettera aux oubliettes le Pacte pour la recherche et la LRU. C’est
seulement dans ce cadre que la communauté scientifique pourra s’engager dans la voie de
la reconstruction.
Au sommaire :
>Actualités
Grèce: un peuple à soumettre
Marc Delepouve
Pour une Syrie libre: un mouvement mondial contre la terreur
Gérard Lauton
Numérisation des livres du XXe siècle: culture indisponible
Bernard Lang
>Environnement et démocratie: des scientifiques s’engagent
La science: enjeu politique pour aujourd’hui et pour demain
Janine Guespin
L’information environnementale: une exigence démocratique
Jacques Thorette, Joëlle David, Claudine Zysberg, Laurent Duhautois
Scientifiques et société: des régimes de connaissance à l’intervention
Michel Blay
Domaine agricole: figures du scientifique en situation controversée
Nathalie Jas, Didier Torny
Liberté intellectuelle et responsabilités: pour une science éthique et responsable
Cécile Sabourin
Sciences de l’environnement: les chercheurs doivent jouer collectif
Bernard Delay
Anne-Marie Moulin: «Résoudre les défis de santé publique en reliant dégâts
environnementaux et dommages sur la santé»
Scientifiques et environnement aux États-Unis: rôle du National Council for Science and the Environment (NCSE)
Peter Saundry
Scientifiques, politiques et citoyens: une triple légitimité
Marc Lipinski
Contre la précarité imposée aux objets: pour la préservation des ressources
Claude Pichot
Patience et longueur de temps… contre «corruption intellectuelle»
Bernard Barraqué
Sous le regard du philosophe de l’urbain: une géohistoire des passions ambivalentes du citadin pour l’eau
Thierry Paquot
>Hors champ
Rita R. Colwell: «L’université américaine préserve sa liberté académique,
ce qui lui permet de relever les défis scientifiques
>Zoom
La recherche à bon marché: déconstruire la néoévaluation
Roland Gori
>Hommage à
Jean-Marc Douillard
Patrick Monfort