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Les excellents désastres du Grand emprunt : les SHS exclues de l’Idex de Montpellier (17/11/2010)

mmSNCS-FSU17 novembre 2010


L’exclusion des SHS du projet d’Idex de Montpellier

Nous avons publié il y a peu les craintes des syndicats FSU de Montpellier sur l’excellent bordel qu’allait mettre sur ce site le Grand emprunt :
[http://www.sncs.fr/IMG/pdf/Texte_FSUsupR-sncs-snesup_um3-um2-um1.pdf

 >http://www.sncs.fr/IMG/pdf/Texte_FSUsupR-sncs-snesup_um3-um2-um1.pdf]
Ces craintes sont confirmées comme le montrent les deux textes ci-dessous : l’exclusion des SHS du projet d’Idex de Montpellier. Mieux que tous nos textes, la lettre de la Présidente de Montpellier 3 synthétise tous les excellents méfaits du Grand emprunt.

Comme partout, les ficelles sont tirées par Valérie Pécresse, qui attribuant son budget à chaque université exerce par tous les moyens d’excellents chantages : « Mercredi nous avons eu copie d’une lettre adressée à la présidente du PRES par la ministre. Une lettre que des plumes locales avaient manifestement aidé à rédiger et qui faisait de la fusion LRU des trois universités la condition de tous les projets montpelliérains sur le ton de la gouvernante privant les enfants turbulents de dessert ».

Avec une vue du découpage du savoir qui date d’un siècle, c’est avec un excellent crétinisme que le ministère veut créer un pôle « sciences dures » au Sud de Paris et un pôle SHS au Nord de Paris, que « les 12 plus prestigieuses grandes écoles » ont été enfermées dans un PRES sans université, et qu’il encourage maintenant l’exclusion des SHS de l’Idex Montpellier. A qui le tour ?

La lettre de la Présidente de Montpellier 3

Chers collègues,

Mercredi soir, lors d’une réunion dans le bureau du recteur, en présence de 4 représentants de la Région, d’un représentant du préfet et des deux autres présidents d’universités, j’ai du me résoudre à quitter les négociations sur le projet d’Initiative d’Excellence (IDEX).

Un courrier de la Ministre, adressé à la présidente du PRES*, fait de la fusion une condition de réussite de l’IDEX et, dans le même temps, les Humanités sont tenues à l’écart de cet IDEX. On nous demande ainsi tout à la fois de renoncer à faire valoir la qualité de notre recherche et de nos formations et de disparaître dans une nouvelle université entièrement dédiée à d’autres disciplines que les nôtres. Autant nous demander de nous saborder.

C’est une décision grave dont je mesure les conséquences pour notre université et l’avenir du site. Par tempérament je préfère toujours trouver une solution, même s’il s’agit d’un compromis, mais cette fois, malgré tous les efforts que notre équipe a déployés depuis 12 mois, je ne vois aucune issue acceptable, aucune alternative pour garantir la pérennité des Humanités à Montpellier. Il y avait bien un projet de grand établissement porté par Montpellier II qui aurait pu permettre de fédérer l’ensemble des forces scientifiques du site tout en garantissant leur autonomie, mais il s’est heurté aux pressions politiques en faveur d’une fusion plus favorable aux écoles et aux instituts.

Quelques paragraphes ne suffisent pas pour vous expliquer comment nous en sommes arrivés à cette décision et, au risque d’être longue, je crois nécessaire de revenir sur les discussions que nous avons eu sur la fusion depuis près de trois ans.

Du projet de fusion à la création du PRES UMSF (juin 2009)

Lors de la campagne de 2008 pour l’élection aux Conseils, la question de la fusion des universités n’était pas prioritaire. Pourtant depuis bientôt 3 ans, l’agenda gouvernemental en a décidé autrement et cette question nous mobilise fortement. Les orientations politiques que nous avons défendues au cours de ces négociations traduisent la volonté de ne pas s’opposer par principe à une évolution des universités, à condition que la place des Lettres, Langues, Arts, Sciences Humaines et Sociales soit respectée.

C’est dans cette optique que nous avons accepté de nous engager dans la création d’un PRES UMSF et dans un processus de fusion qui conditionnait la candidature de Montpellier au Plan CAMPUS. Les efforts pour rétablir les finances de l’établissement, structurer notre offre de formation et notre recherche, nous permettaient de négocier en égaux avec les universités de Montpellier 1 et Montpellier 2. Il nous semblait donc possible de construire une université unique à Montpellier respectueuse de la diversité scientifique des établissements membres.

Les obstacles au processus de fusion

Ce processus de fusion s’est très vite enrayé. Le PRES UMSF devait jouer un rôle de coordination et être un lieu de débat et de rapprochement ; il s’est positionné en gouvernance des universités dans ses secteurs d’activité. Des conflits personnels entre la présidence de Montpellier 1 et le PRES se sont doublés de conflits entre les anciens personnels du « Pôle Européen », intégrés dans le PRES, et les responsables des universités. Des actions comme l’accueil des étudiants étrangers et l’international qui constituaient une vraie réussite à porter au crédit du Pôle Européen, sont devenues sources de conflits avec les universités. Quant aux relations entre les présidences de Montpellier 1 et Montpellier 2 et la présidence du PRES ce n’est un secret pour personne qu’elles sont vite devenues exécrables. Progressivement, le PRES s’est mis à fonctionner sans lien avec les universités ne les consultant même pas sur des dossiers aussi essentiels que le contenu des projets immobiliers du Plan CAMPUS. Loin des grands discours ministériels sur « l’autonomie des universités », M. le recteur nous apprend ainsi qu’il discute avec la Mairie de Montpellier et le PRES de la localisation et du contenu de l’ATRIUM (le projet de nouvelle bibliothèque et de lieu de vie étudiante porté par UM3) sans même nous en informer.

À ces conflits de personnes sont venus s’ajouter des conflits institutionnels plus sérieux et des problèmes financiers. L’université Montpellier 1 et l’université Montpellier 2 se sont opposées sur le modèle d’organisation de la future université unique de Montpellier. UM1 souhaitait une fusion aboutissant à une seule université facultaire, une sorte de « grande» Université Montpellier 1. UM2 s’y opposait estimant qu’on ne pouvait gouverner des milliers de chercheurs et de personnels administratifs et des dizaines de milliers d’étudiants avec une vingtaine d’élus. UM2 voulait au contraire renoncer au statut d’université pour créer un « grand établissement » absorbant les 3 universités et organisé sous forme de « pôles » thématiques avec un Sénat Académique élargi permettant une meilleure représentation des personnels. Ce schéma n’était pas acceptable par les deux autres établissements car il donnait un poids trop grand aux sciences « dures » et aux laboratoires par rapport aux composantes, UFR et Instituts.

Pendant toute cette année 2010, nous avons cherché à rapprocher les points de vue en proposant plusieurs solutions de compromis. Nous suggérions, pendant un temps, de créer une université « fédérale » où le PRES donnait à l’international et à l’extérieur une identité unique à Montpellier, tout en conservant le contrôle des domaines de formation et de la recherche dans les universités. Nous n’avons pas ménagé nos efforts auprès des présidences d’UM1, UM2, du PRES, du recteur, de la Région ou du cabinet de la ministre, mais jamais nous n’avons pu aboutir. Chaque acteur restait sur son projet sans même accepter de débattre du projet de l’autre.

A ce conflit institutionnel s’est ajouté une difficulté financière avec l’adoption par le ministère d’un nouveau système de calcul des crédits des universités, le modèle « SYMPA ». Ce nouveau système oublie totalement l’interuniversitaire et pénalise les universités qui se sont engagées dans une démarche de rapprochement et de mutualisation. Montpellier, et particulièrement UM3 avec la BIU, ont été et sont toujours très affectées par cette politique. Nos moyens en personnel administratif et nos crédits sont réduits parce que nous portons la BIU. Au lieu de faciliter une fusion des universités, le système « SYMPA » remet en cause tous les processus historiques de rapprochement des établissements.

Un nouveau projet : le Grand Emprunt et « l’IDEX »

Enfin, le gouvernement a porté l’estocade au projet de fusion avec son nouveau projet de Grand Emprunt et la création de l’IDEX. Nous connaissons tous maintenant la stratégie de ce gouvernement qui annonce chaque jour un nouveau projet pour ne pas avoir à rendre de compte sur les promesses non tenues auparavant. Le Grand Emprunt promet des milliards de crédits à quelques pôles « d’excellence » sélectionnés par un jury international. La réalité est beaucoup plus modeste. Il s’agit, en fait, de donner à certains secteurs de recherche les intérêts du placement de l’argent du grand emprunt soit l’équivalent d’une grosse ANR pour les projets de LABEX (laboratoires d’excellence) et un peu plus pour les IDEX (initiatives d’excellence, d’abord appelées Campus d’excellence). Ces crédits ne sont pas garantis puisqu’ils dépendent du rendement des placements boursiers et ils ne sont dus que pour 4 ans tandis que les universités s’engagent à financer l’action sur 10 ans… D’ailleurs tous les projets qui nous sont proposés s’accompagnent de demandes de financement à prendre sur notre budget récurrent : 240.000 € pour une année de PRES (sans compter les personnels mis à disposition et les crédits interuniversitaires centralisés au PRES), 250.000 € demandés par la Région pour le projet IHU, Une somme non encore chiffrée mais annoncée comme très conséquente pour le projet de société anonyme de valorisation de la recherche, etc… Surtout, sous couvert d’excellence, le projet du gouvernement cible certains secteurs scientifiques et oublie quasiment nos disciplines. Même excellente, la recherche en Lettres Langues, Arts, Sciences Humaines et Sociales, ne peut prétendre qu’à un rôle d’appoint de projets jugés plus rentables pour les entreprises, agro-alimentaire, chimie, bio-santé, etc…

Le manque d’intérêt pour l’excellence dans nos disciplines

Dans ce contexte la fusion n’était plus possible puisque la future université unique allait devoir s’engager à financer en priorité certaines disciplines sans qu’aucune garantie ne soit donnée aux autres quant à leur pérennité. Pour Montpellier III nous n’avions plus comme perspective que d’assurer la formation en langue des futurs étudiants et collègues « d’excellence » qu’accueilleraient l’agro, la chimie ou la biologie et la santé.

Les discussions sur le périmètre de l’IDEX à Montpellier ont bien vite montré cet écueil. Une quinzaine d’organismes représentant quelques centaines d’étudiants discutaient de la prééminence de la biologie sur la santé, de la priorité à donner à l’environnement ou à l’agronomie, au milieu aquatique ou au milieu marin et lorsque l’université Montpellier III a souhaité que la culture et l’interculturalité soient mentionnées pour décrire l’ensemble des humanités il nous a été répondu que si chacun demandait un mot clef pour sa discipline on n’y arriverait pas… Un mot pour décrire les Lettres, les Langues, les Arts, la psychologie, la sociologie, l’histoire, la géographie, le développement social et les ressources humaines, la documentation, l’information et la communication c’était déjà trop, tandis qu’il fallait bien un mot pour chaque sous-équipe de chaque laboratoire d’agronomie.

La nouvelle proposition faite par l’université Montpellier II pouvait débloquer la situation et permettre un équilibre entre IDEX et autres domaines d’excellence, universités, organismes de recherche, instituts et écoles. Au lieu de chercher à fusionner les établissements en faisant disparaître toute autonomie, le projet UM2 proposait de les associer dans un processus de co-construction des pôles scientifiques. Tout en restant autonomes, les universités et les organismes étaient invités à s’associer aux pôles scientifiques de UM2 pour partager la construction de ces pôles. En SHS, par exemple, le projet consistait à réunir UM2 et UM3 sur un même pôle qui aurait pu piloter, dans un premier temps l’IUFM, voire la Bibliothèque inter-universtaire. À l’opposé des conflits d’intérêts qui ont bloqué tout processus de rapprochement, UM2 faisait le choix de la confiance et du respect mutuel pensant que les complémentarités conduiraient avec le temps les différents acteurs à développer ensemble une politique scientifique commune. UM1, Supagro, l’école de chimie craignant de perdre leur leadership se sont opposés à ce projet, rejoint en cela par le PRES et surtout la Région, le préfet et le recteur.

Mercredi nous avons eu copie d’une lettre adressée à la présidente du PRES par la ministre. Une lettre que des plumes locales avaient manifestement aidé à rédiger et qui faisait de la fusion LRU des trois universités la condition de tous les projets montpelliérains sur le ton de la gouvernante privant les enfants turbulents de dessert. La menace, outre son caractère inadmissible lorsque l’on prétend promouvoir l’autonomie des universités, pèse en réalité essentiellement sur Montpellier III et son projet d’ATRIUM puisque le ministère et la Région se sont déjà entendus pour financer la faculté de médecine, l’école de chimie et, par ce courrier, les projets du CROUS et de SupAgro. UM3 fait ainsi les frais de l’incapacité d’UM1 et UM2 à s’entendre et des multiples annonces gouvernementales.

Les différentes injonctions du ministère vont toutes dans le même sens et écartent systématiquement nos disciplines pour une disparition programmée des Humanités tout en insistant pour que le plan CAMPUS et l’IDEX se fassent dans le cadre strict de la fusion. Cette disparition n’est d’ailleurs même pas une garantie de succès pour le site puisqu’on nous annonçait par la même occasion qu’il n’y aurait finalement que 2 ou 3 IDEX en France dans un premier temps, et peut être 6 au terme du processus.

Il n’est pas acceptable de souscrire à un tel schéma imposé par des acteurs pour qui le développement scientifique de Montpellier n’est pas la priorité. C’est la raison pour laquelle j’ai du me résoudre à retirer UM3 du projet d’initiative d’excellence. Pour la même raison l’Université pourrait être appelée à renoncer au plan CAMPUS malgré tout l’intérêt du projet ATRIUM, parce qu’on ne peut sacrifier les Humanités pour un plat de lentilles payé à crédit et dont on ne sait même pas s’il sera servi un jour.

Déclaration du bureau de la section SNCS de Montpellier

Hier, le mardi 16 novembre, la Présidente de l’Université Montpellier 3 (lettres et sciences humaines, NDLR) a annoncé à ses personnels que son université ne faisait plus partie du projet Idex, autrement dit, ne bénéficierait pas des financements éventuels du « grand emprunt ».
Les universités de Montpellier voient se concrétiser les menaces qui pesaient depuis un certain temps sur elles. Et ces menaces n’étaient pas du tout de leur fait mais sont nées, sans contestation possible, de la politique néfaste du gouvernement.
Celui-ci, dans la continuité du gouvernement Villepin fait tout son possible pour privatiser les universités. Il manie pour cela le bâton et la carotte. La carotte, c’est celle de milliards d’euros, toujours annoncés (par le biais des opérations « Campus » ou « grand emprunt ») et jamais vus. Le bâton, c’est la demande expresse d’en finir avec la gestion des universités par la démocratie. Jusqu’à présent en effet, les universités sont gérées par leurs personnels, élus sous la forme de président ou de vice-présidents de conseil d’administration.
L’autre aspect du bâton, c’est la demande de ne retenir pour l’avenir que les projets de recherche, avec une conception de la recherche uniquement orientée vers la recherche industrielle.
Evidemment, de ces deux points de vue gouvernementaux, l’Université de Montpellier 3 n’a aucun avenir.
Mais il ne faudrait pas croire que la crise actuelle soit une originalité de Montpellier. L’université d’Orsay-Paris Sud est elle aussi traversée de graves turbulences, face à la volonté du gouvernement de créer de toutes pièces un « nouveau Harvard » sur le site voisin de Saclay !

Face à la situation, le SNCS exprime leur plus grande solidarité aux personnels de l’université Montpellier 3 et invite l’ensemble des responsables politiques locaux à tout faire pour que le gouvernement cesse ses pressions et fasse en sorte que les universités puisse mener à bien ses missions de service public, en direction d’une recherche et d’une enseignement de haut niveau, au bénéfice des citoyens.



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