Avis du conseil scientifique de l’Inserm
Le Conseil Scientifique de l’INSERM est favorable aux objectifs de meilleure lisibilité et de meilleure coordination du dispositif de recherche dans le champ des sciences biomédicales et de la santé. Dès lors qu’elle serait effectivement dotée par l’Etat des moyens financiers à la hauteur des ambitions affichées, une telle approche est de nature à impulser un nouvel élan à la recherche biomédicale fondamentale et appliquée et à la recherche en santé, à favoriser leur rayonnement et leur compétitivité internationale et à soutenir le développement médical, sanitaire, social, économique et culturel de la communauté nationale.
La nouvelle organisation de l’INSERM en huit Instituts thématiques fonctionnels s’inscrit dans l’objectif de coordonner l’ensemble des partenaires publics concernés en recherche biomédicale et en santé. Après examen approfondi, le Conseil Scientifique de l’INSERM constate que les Instituts thématiques présentés sont à des stades de maturation et de configuration très différents. Certains instituts qui s’appuient sur des structures préexistantes (Agence Nationale de Recherches sur le Sida et les Hépatites, Institut National du Cancer) sont focalisés, disposent de moyens financiers propres pour tout ou partie de leur champ de compétences, et coordonnent la distribution de ces moyens en direction de l’ensemble des acteurs de la recherche concernés. Les autres instituts affichent en revanche un périmètre et des modalités de fonctionnement qui demandent à être précisés pour pouvoir vraiment apprécier leur valeur ajoutée potentielle aux dispositifs de recherche existants. La question générale qui se pose est celle de l’évolution de cet ensemble vers des Instituts thématiques de nature, de fonctionnement et de financement globalement plus homogènes.
Le Conseil Scientifique de l’INSERM souhaite que cet objectif de meilleure lisibilité et de meilleure coordination s’inscrive dans le cadre de l’ensemble des missions de la recherche biomédicale et en santé relevant de la production des connaissances, de la découverte et de l’évaluation des moyens d’intervention pour prévenir et traiter les maladies, de la valorisation des résultats de la recherche, de la diffusion des connaissances et de la formation à la recherche et par la recherche. La nécessaire interaction des Instituts thématiques sur tous ces sujets apparaît comme un élément essentiel de leur fonctionnement.
De plus, le Conseil Scientifique de l’INSERM souhaite attirer l’attention sur le besoin de clarification de plusieurs aspects spécifiques du projet de réorganisation de l’INSERM en Instituts thématiques afin de garantir son succès. Ainsi, les points énumérés ci-après demandent à être précisés et développés.
Il s’agit :
de la relation avec les autres partenaires de la recherche publique, susceptibles de contribuer directement ou indirectement à la recherche biomédicale et en santé, notamment de l’articulation avec la recherche dans d’autres domaines (mathématiques, physique, chimie, biologie structurale, sciences humaines, économiques et sociales, etc…). La nouvelle organisation nécessite de faire apparaître des propositions susceptibles d’induire des transversalités et des pluridisciplinarités effectives, tant entre les différents domaines de recherche qu’entre les différents établissements concernés, et d’assurer le bon continuum entre recherche fondamentale, recherche clinique et recherche translationnelle, sans omettre le lien indispensable avec la recherche en santé publique et en sciences sociales. Des précisions devraient être apportées sur les conditions de coordination entre les partenaires pour les missions de formation à et par la recherche, en particulier avec les Universités et les Grandes Ecoles, de participation aux projets européens et de collaborations internationales ;
du fonctionnement des Instituts thématiques. En l’état, la notion de « pilotage » par l’INSERM ou de « co-pilotage » avec d’autres établissements est imprécise. Le mode de désignation des directeurs des Instituts thématiques devrait à l’avenir constituer une prérogative de la direction de l’établissement en charge de la coordination de l’ensemble des recherches biomédicales et en santé. La durée de la mission des directeurs ainsi que la définition du mode de constitution des groupes d’experts entourant ces directeurs devraient aussi faire l’objet de concertation avec les instances scientifiques ;
du périmètre et du nombre d’instituts qui doivent être ouverts afin de s’inscrire dans une vision dynamique des évolutions scientifiques et dans le cadre de consultations avec les instances scientifiques ;
des financements dont la Direction Générale de l’INSERM conservera la maîtrise afin que l’établissement reste un opérateur essentiel de la recherche publique ;
des moyens effectivement mis à disposition des Instituts thématiques par l’établissement en charge du pilotage, notamment pour ce qui concerne le financement des laboratoires et la création de postes de chercheurs et d’ITA titulaires. Ce dernier point est particulièrement critique dans le contexte actuel de vieillissement de la pyramide des âges des personnels des établissements publics de recherche dont l’INSERM ;
de la garantie de l’autonomie de la communauté scientifique dans la définition des orientations scientifiques et stratégiques de la recherche en prenant appui sur les instances scientifiques ;
des rôles respectifs des Instituts thématiques et des instances scientifiques existantes des établissements publics de recherche dans l’évaluation des programmes de recherche, dans l’évaluation des personnels et des laboratoires, et dans la prospective scientifique, en particulier dans le cadre des relations avec l’AERES ;
de la participation des Instituts thématiques à l’harmonisation, au décloisonnement et à la transparence des procédures de recrutement, d’évaluation et de financement auxquels sont actuellement soumis les laboratoires de recherche ;
de l’articulation de l’action des Instituts thématiques avec la politique de l’ANR, avec la montée en puissance de l’autonomie des universités dans le contexte de la LRU et avec les établissements hospitaliers.
Le Conseil Scientifique de l’INSERM partage les demandes adressées aux pouvoirs publics par de nombreuses autres instances scientifiques et par les personnels de la recherche publique en faveur de l’ouverture d’une véritable concertation de l’ensemble des partenaires. Cette concertation devra s’appuyer avant tout sur les réalités objectives, points forts et points faibles, de notre système de recherche. Il souhaite participer pleinement à toute démarche que les pouvoirs publics initieraient en ce sens, notamment pour examiner les options possibles de l’évolution de l’organisation des recherches en sciences biomédicales et en santé et, plus largement, de l’articulation avec l’ensemble des sciences du vivant. Dans ce contexte, le Conseil Scientifique de l’INSERM souhaite également poursuivre sa réflexion conjointe avec le Conseil Scientifique du Département des Sciences du Vivant du CNRS et avec les instances scientifiques d’autres établissements désireux de s’y associer.
Résultats du vote du conseil scientifique en date du 8 juillet 2008
25 oui / 5 non / 30 votants