Condition et responsabilité du chercheur : regards croisés
- Parution
- 12/2016
- Numéro
- 406
édito
par Chantal Pacteau
Condition et responsabilité du chercheur : regards croisés
Au terme d’une longue phase d’examens, consultations, hésitations entre une totale refonte et une mise à jour de l’existant, la Conférence générale de l’Unesco a décidé le principe d’une révision de la Recommandation de 1974 sur les chercheurs 1 2.
Le 8 septembre 2016, la Commission nationale française pour l’UNESCO (CNFU), en partenariat avec le Conservatoire national des Arts et Métiers (CNAM), invitait des représentants de la communauté scientifique, de comités d’éthique, de l’UNESCO, du milieu politique ainsi que le SNCS et le SNESUP, pour débattre de la condition des chercheurs aujourd’hui et de propositions autour de la révision de la Recommandation. Ce dossier se fait l’écho de ces débats.
Pourquoi réactualiser cette Recommandation ? Dans son discours d’ouverture, Daniel Janicot, président de la CNFU, a rappelé à quel point les trois piliers sur lesquels elle repose ont changé : le cadre de référence de la société où les techno-sciences ont pris un rôle considérable ; la nécessité de régulations nouvelles des politiques publiques, du fait des défis formidables posés par des domaines de recherche tels que les nanosciences, la biologie de synthèse, l’intelligence artificielle ou encore le transhumanisme ; et la responsabilité individuelle et collective des chercheurs qui devrait être la « clé de voûte de l’édifice ». Il a rappelé combien « les inconduites scientifiques, les pratiques douteuses notamment dans l’attribution des mérites, les devoirs d’alerte ont ébranlé le rapport de confiance entre chercheurs et citoyens ».
Mais, comme le SNCS et le SNESUP l’ont répété : « Quid des institutions qui « managent » le travail des chercheurs ? Quid des effets délétères de la mise en concurrence et de l’insuffisance des moyens humains et financiers dans la mission scientifique qui nous est confiée ? Quid du travail indispensable de hiérarchisation des responsabilités entre droit de l’homme, droit du citoyen, l’individuel, le collectif, le bien commun ? »
Et, ajoute ce dossier, quid des citoyens qui s’engagent dans des initiatives telles que le procès fictif de Monsanto ? «L’aventure de la recherche n’est pas seulement une quête individuelle mais aussi une participation à la construction de la société de demain, construction qui ne peut se faire qu’en dialogue avec ceux qui estiment avoir leur mot à dire sur ce qu’elle sera, c’est-à-dire tous les citoyens 3.»
Le texte révisé de la Recommandation sera à l’ordre du jour de la Conférence générale de l’UNESCO de novembre 2017.
1 Dafna FEINHOLZ, chef de la Section bioéthique et éthique des sciences – Secteur des Sciences sociales et humaines de l’UNESCO. http://sncs.fr/VRS-no397-08-2014
2 Est considérée comme chercheur.e toute personne ayant une activité de recherche: enseignants-chercheurs, chercheurs, post-doc…
3 Bernard Chevassus-au-Louis, L’appropriation du vivant : de la biologie au débat social. Le Courrier de l’environnement de l’INRA n°40, 2000. http://www7.inra.fr/dpenv/
chevac40.htm