Edito par Anne Roger

L’égalité professionnelle n’est pas juste un horizon lointain ou un slogan, c’est une urgence concrète. Elle ne saurait se réduire à une promesse institutionnelle. Elle exige des outils concrets, des indicateurs lisibles, des mécanismes contraignants.

Elle se joue dans les grilles salariales, les trajectoires de carrière, les congés, les arbitrages budgétaires, les représentations implicites. Derrière les chiffres, si pertinents soient-ils, et les plans d’action bien ficelés, les inégalités persistent, se transforment et se camouflent. Elles prennent la forme d’écarts de salaires, de plafond de verre, d’interruptions de carrières, de temps partiels, de différences de traitement, de violences sexistes et sexuelles, de manque de considération et de mépris, etc.

L’égalité se joue dès le plus jeune âge, dans les familles, mais aussi à l’école – en témoigne le regard porté sur les filles en mathématiques dans ce dossier – et jusque dans les laboratoires, où les chercheuses peinent encore à franchir les seuils de la reconnaissance et se heurtent à des résistances culturellement ancrées. L’égalité se conquiert chaque jour, face aux inerties institutionnelles, aux logiques d’austérité, aux stéréotypes et aux normes patriarcales qui les perpétuent.

Ce dossier explore les angles morts et les leviers d’action. Il interroge les accords égalité et la transposition de la directive européenne sur la transparence des rémunérations, pour que les écarts ne soient plus invisibles et disparaissent. Il donne à voir les résistances systémiques, les effets de l’austérité sur les femmes, les limites des grilles indiciaires, mais aussi la conquête au long cours de nouveaux droits : congés menstruels, santé au travail, parité dans la recherche.

Il dessine les contours d’une « culture de l’égalité » dans l’enseignement supérieur et la recherche. Une culture qui ne tolère plus les récits de sexisme ordinaire, mais qui valorise les parcours, les luttes, les figures pionnières – de Marie et Irène Curie à Rita Colwell.

L’égalité professionnelle ne se négocie pas à la marge. Elle exige des politiques volontaristes, une vigilance collective mais aussi une rupture avec les normes patriarcales qui structurent notre société et les rapports sociaux de genre.

Dans un contexte où les forces conservatrices et réactionnaires ne cessent de gagner du terrain, ce dossier est une invitation à penser, à agir, à ne plus transiger. En commençant par questionner notre environnement le plus proche : celui de l’enseignement supérieur et de la recherche.