édito

Par Florence Audier et Hervé Cristofol

Bienvenue en doctorat

Le doctorat est une expérience unique et multiple. Singulière car son niveau d’exigence scientifique en fait la plus haute qualification internationalement reconnue et la seule à ouvrir les portes des emplois de la recherche scientifique. Multiple parce qu’à la fois formation et expérience professionnelle, elle est une formation à et par la recherche qui permet aux doctorantes et aux doctorants de participer à des enseignements, d’en dispenser et de faire avancer nos connaissances à la frontière des savoirs, avec des chercheurs plus expérimentés et en collaboration avec eux au sein de laboratoires et des écoles doctorales.

Après la loi LRU de 2007 et la loi ESR de 2013, la loi de programmation de la recherche (LPR) en modifie encore le périmètre et la nature en permettant à des entreprises et fondations de les délivrer. Cette année 2020 a vu la science et la recherche être dénigrées ou manipulées dans différents pays et priées, voire intimées, de produire dans l’urgence des résultats pour sortir de la pandémie.

Alors que plusieurs programmes de recherche ont été privés de l’accès à leurs terrains ou à leurs données et que des doctorantes et des doctorants ont perdu un temps précieux, voire ont été mis en grande difficulté, il nous est apparu important de consacrer ce dossier au doctorat. Afin de prendre la mesure des transformations en marche, notre dossier s’intéresse à la fois au doctorat, aux doctorants, à leurs encadrants et aux jeunes docteurs dans leurs diversités de disciplines et de destins.

Dans un premier article nous rappelons l’ambition du doctorat et la formidable aventure scientifique et humaine dont il est le vecteur. Nos camarades de la Confédération des jeunes chercheurs témoignent des enjeux de sa reconnaissance et Philippe Aubry présente les différentes sources et contrats qui permettent son financement. Florence Audier s’intéresse à la place et au devenir des ingénieurs qui deviennent docteurs. Elle montre aussi combien le doctorat est un « marché » international en pleine expansion. En s’intéressant au secteur industriel de la chimie, dont la convention collective a été la première à désigner le doctorat, avec Claude Mirodatos, ils analysent la portée de cette mesure ainsi que les conséquences de la LPR sur les contrats d’embauche des post-doctorants. Hervé Christofol décrit les compétences acquises par les docteurs telles qu’elles sont maintenant reconnues dans le répertoire national des certifications professionnelles. Jacques Haiech développe l’importance du respect de l’intégrité scientifique face aux tensions que doivent gérer les doctorants dans notre univers compétitif où règnent les indicateurs. Enfin, huit chercheur·es et enseignant·es-chercheur·es habilité·es à diriger des recherches issu·es de disciplines, de laboratoires, d’universités et d’organismes de recherche différents partagent leurs expériences. Ils témoignent, à travers leur diversité, de l’unicité de cette formation-action dont la France tarde toujours à reconnaitre toute la richesse.