Opposition de la CPCN à la proposition des « CNRS Key Labs »
La CPCN a adopté à l’unanimité la motion de la C3N concernant les ainsi-nommés « CNRS key-labs » (ci-après CNRSKL). Au-delà des principes généraux et des arguments soutenus dans cette motion, la CPCN souhaite insister sur les aspects relatifs aux évaluations confiées aux sections.
La mission des sections et CID est d’évaluer les demandes de renouvellement d’association au CNRS des unités et non d’organiser ni permettre une forme de discrimination entre elles. Il en va de même pour l’évaluation des chercheurs et chercheuses, laquelle s’effectue toujours, comme nous l’avons rappelé par nos motions de janvier 2022 et de juillet 2023, au regard de leur contexte de travail. Nous attendons de la direction du CNRS qu’elle explique comment fonctionnerait une évaluation à deux vitesses : celle visant les collègues des CNRSKL et celle visant les collègues hors-CNRSKL. Nous considérons les concours, pour lesquels nous formons les jurys d’admissibilité, sur les mêmes principes. Les sections et CID apprécient la valeur scientifique d’une candidature au regard de l’adéquation entre le ou la candidate, son projet et son environnement de travail, lequel doit permettre la réalisation optimale du projet, notamment grâce à un personnel et un environnement de travail adaptés. Nous refusons par avance toute exclusion ou minoration d’une candidature au prétexte qu’elle serait attachée à un vœu d’affectation à une unité qui ne serait pas CNRSKL.
Par ailleurs et de manière plus générale, les sections et les CID défendent la diversité et l’originalité scientifiques, conformément aux principes historiques du CNRS qui sont de promouvoir et défendre les niches, les expérimentations, les risques, l’exploration scientifiques. Ce souci guidera tant l’appréciation des unités que celle des chercheurs et chercheuses et des candidatures (au recrutement et aux promotions), comme il l’a toujours guidé. Instaurer une démarcation entre laboratoires CNRSKL et laboratoires non-CNRSKL, c’est préférer la science établie, rassérénée, précautionneuse, plutôt que l’audace ; c’est ordonner l’appréciation scientifique au volume des financements, des immobilisations dans les équipements dits « lourds », des projets réalisés, aux dépens de l’évaluation par les pairs de la promesse de renouvellement scientifique dans des projets d’avenir. C’est préférer le passé au futur.
Alors que les travaux menés en sociologie des sciences n’ont jamais été en mesure d’établir une corrélation vertueuse entre la concentration des unités de recherche et la valeur de la science produite, la politique des « CNRS key-labs » vise à accélérer ce mouvement de concentration sur la base de critères comptables, alors même, par ailleurs, que le CNRS poursuit une politique d’appréciation qualitative de la recherche, avec laquelle nous sommes pleinement en accord.
Au regard de ces éléments, les sections et les CID s’opposent à ce que ces funestes « CNRS key-labs » soient adoptés. Elles informent la communauté scientifique que, si elle advenait, leur adoption ne modifierait en rien les pratiques d’examen des unités de recherche, d’évaluation des chercheurs et chercheuses, ni d’appréciation des candidatures aux concours et aux promotions, que les sections et les CID mettent en œuvre en toute indépendance et dans le respect le plus vigilant des principes d’intérêt général qui les fondent.