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Réflexions sur les relations science/économie, à propos de « l ‘affaire » Metagenex

Laurent Lefèvre27 novembre 2007

J-P Liautard (élu SNCS au Conseil d’administration de l’Inserm), Françoise Cavaillé


À la suite des années Reagan et Thatcher, la recherche anglo-saxonne a profondément modifié son rapport à la société, d’une science essentiellement tournée vers la connaissance, rendant compte principalement à la représentation nationale (rapport W. Bush), elle s’est engouffrée dans une marche forcée vers le financement privé et la rentabilité économique. Les résultats dans le domaine économique, principalement celui des start-up ont été décrits et analysés, puis vantés et montés en exemple, mais les conséquences sur le développement de la science sont été plus rarement prises en considération. Pourtant, des rétractations et des « fraudes » apparaissent maintenant au grand jour. On peut attribuer ces dérives à des comportements individuels, mais il est incontestable que la pression ne peut que les accentuer voire les susciter. La pression à la valorisation rapide a d’autres effets pervers, comme la publication prématurée de résultats, mal ou pas validés, mais qu’il faut breveter immédiatement, compétition oblige.

Les politiques français, aux prises avec les difficultés économiques, ont été éblouis par l’efficacité de l’innovation à l’anglo-saxonne et ont décidé d’appliquer les mêmes recettes à la recherche française. À l’Inserm, la direction générale a accompagné et même souvent devancé cette volonté politique de faire de la recherche scientifique française un outil de l’innovation économique. Les rapports d’activité de l’Inserm affichent maintenant essentiellement les résultats « valorisables » des laboratoires, comme s’il était devenu marginal d’y développer des recherches cognitives. Et ceci malgré un discours qui reconnaît le bien-fondé du fameux « continuum de la recherche fondamentale à l’appliqué ». Pour les chercheurs, la pression vers l’application et la valorisation économique est devenue la compagne de tous les jours. Le « publish or perish » se change inexorablement en « valorise ou disparaît ».

Aujourd’hui, les conséquences de cette marche forcée vers la valorisation commencent à être observées. De plus en plus d’équipes abandonnent la recherche cognitive afin d’obtenir des financements, et, malgré les discours rassurants, on constate une tendance à l’écrasement de la recherche fondamentale.

Autre effet pervers : une fois protégé par un brevet, le développement de la « découverte » passe plus ou moins rapidement dans les mains des financiers dont les motivations ne ressemblent pas celles des chercheurs.

L’affaire Metagenex et la démission du directeur général de l’Inserm découlent de la contradiction entre la nécessité éthique de valider un résultat par des recherches sur le long terme et la logique de la rentabilisation rapide des financeurs privés.

Nos tutelles doivent être particulièrement vigilantes sur les conditions dans lesquelles les chercheurs des organismes publics sont amenés à contracter des accords de valorisation avec des partenaires privés. Le service rendu à la société par la mise sur le marché des résultats de nos recherches doit pouvoir primer le profit qu’ils peuvent générer.Réflexions sur les relations science/économie, à propos de « l’affaire » Metagenex


Laurent Lefèvre



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