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Thème 2 – État des lieux

Jean-Luc Mazet2 avril 2015

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Préambule

  1. « Ce qui se joue dans la performance de notre recherche fondamentale et technologique, jusqu’au transfert vers l’industrie et la société, ce sont les innovations de rupture, l’amélioration de notre compétitivité, la création de nouvelles activités économiques, d’entreprises et d’emplois, la diffusion de modèles de progrès pour tous. » (loi sur l’ESR). Ainsi, aujourd’hui, comme pendant les dix ans de gouvernement de droite, la recherche et l’enseignement supérieur publics sont assignés à fournir de la matière première (les découvertes et inventions) à une industrie dont l’objectif serait de maintenir et conquérir de fantasmatiques marchés « compétitifs ».
  2. Dans le même temps, le rapport des citoyens à la science se polarise :
    • d’un côté, le sentiment de confiance envers la science s’émousse, sans doute du fait de la confusion entre science et innovation et des peurs générées par les risques le plus souvent dus à une utilisation technologique non régulée, attribués à la science en général ;
    • de l’autre, se manifeste une confiance parfois aveugle dans la capacité de la science à trouver réponse à tout et à soigner tous les maux. Avec l’aspiration grandissante à plus de démocratie, les questions de participation des citoyens non seulement aux décisions, mais aussi, parfois aux réalisations de cette science, sont à l’ordre du jour partout dans le monde.
  3. C’est au rejet de cette injonction pour une excellence qui se réduit à la recherche du profit maximal pour l’entreprise et à l’envie de démocratie et de partage face aux défis considérables environnementaux et sociaux qu’ils doivent faire face, en décryptant et détoxifiant les idéologies et les processus qui veulent les aliéner.

État des lieux

  1. L’ANR et l’AERES ont été les premières étapes d’un processus qui visait d’abord à aplanir l’obstacle aux pilotage des organismes de recherche et donc des laboratoires.
  2. Ensuite, la loi LRU a vidé l’autonomie scientifique des universités de tout contenu réel. Le CNRS, l’Inserm ont été cloisonnés en «instituts».
  3. L’ensemble des organismes de recherche (EPST et EPIC) ont été placés sous la coupe d’«alliances» structures non juridique mais de fait institutionnalisées, qui organise la politique de programmation scientifique dans 5 domaines (Aviesan, AncreAllistene, AllEnvi et Athena). Agreenium a été créé comme EPCS dans le domaine agro- nomique. L’AIRD (Agence inter-établissements de recherche pour le développement) a été créée au sein de l’IRD.
  4. La croissance du CIR au détriment du financement des crédits de base de la recherche a eu pour double effet la baisse de l’investissement des entreprises dans la recherche et la soumission des laboratoires à une «culture de projets».
  5. Le gouvernement s’est appuyé ces premières structures pour aller beaucoup plus loin,avec le «grand emprunt», dont les intérêts sont compensés dès 2011 par la baisse des crédits des laboratoires et des programmes.
  6. Le choix des thèmes «prioritaires», enfermés dans les créneaux étroits de la SNRI, passe désormais aux Alliances et «initiatives d’excellence», sur le choix desquelles pas un seul Conseil d’administration, pas un seul Conseil scientifique n’a eu à s’exprimer sur le contenu des candidatures.
  7. Actuellement, sur un même territoire peuvent désormais exister un PRES, une FCS, un Campus, un IdEx aux contours différents. Ce que la Cour des comptes appelle «l’empilement supplémentaire des labels et des structures et la complexification des relations entre les acteurs».
  8. Toutes ces contre-réformes ont été mises en œuvre à crédits constants et en imposant la décroissance de l’emploi scientifique. Depuis 2007 à 2012, les gouvernements successifs de François Fillon n’ont pas investi un sou de plus dans l’enseignement supérieur et la recherche (en euros constants) alors que l’immense majorité des autres pays progressaient fortement.
  9. Les conséquences en sont:
    • le financement de la recherche sur projets au détriment du financement de base des équipes,
    • la baisse des effectifs titulaires depuis de nombreuses années avec pour corollaire le développement explosif de la précarité;
    • la transformation de l’évaluation de conseil en une évaluation technocratique de sanction,
    • l’introduction de primes au mérite mettant en concurrence les individus alors que la recherche est soutenue par l’organisation en équipe.
  10. La communauté scientifique attend une véritable rupture avec cette politique.Si une partie des réformes passe par la mise à disposition des moyens financiers qui permettraient de redonner à l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR) sa place dans la société, une autre partie est liée aux structures.
  11. Le projet de loi actuel fait suite aux assises de la recherche et au rapport de la consultation parlementaire organisée par l’OPECST (Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques) du sénateur Le Déaut.
  12. Si le SNCS a fortement critiqué l’organisation des assises, notamment à l’échelon régional, considérant que la communauté scientifique n’était pas suffisamment entendue, il a comparé ses propres propositions avec celles du rapport final des assises, rédigé par Vincent Berger, et celles du rapport de l’OPECST, rédigé par le sénateur Le Déaut. Ces deux rapports proposent quelques avancées, notamment:
    • la suppression du concept de «périmètre d’excellence» et de la personnalité morale des Idex, et l’organisation d’un rééquilibrage du territoire par des programmes d’investissement dans chaque site;
    • l’affirmation que l’UMR est la brique de base de l’organisation de la recherche, l’unité de recherche constituant la seule personnalité morale, tandis que les Labex, Equipex et Idex seraient remplacés par de simples «groupements de coopération scientifique», structures légères et sans existence institutionnelle;
    • enfin l’accroissement de 1,2 milliard du budget de l’ESR chaque année, pendant 10 ans.
  13. Le rapport Le Déaut, pour sa part,
    • propose de remplacer l’AERES par une autorité administrative qui, notamment, délèguerait aux instances scientifiques d’organismes l’évaluation des UMR;
    • affirme le rôle de l’État et dit son opposition à une régionalisation de l’ESR.
  14. Oubliant ces quelques avancées, le projet de loi reste dans continuité de la LRU et du «Pacte pour la recherche».
    • Il aggrave la dépossession des instances démocratiques représentatives de la communauté scientifique, de leur rôle d’évaluation des activités des laboratoires et de la prospective scientifique:
    • Il ne simplifie pas le «mille-feuille» institutionnel et conserve les structures d’«excellence» de l’ancien gouvernement;
    • Il ouvre des possibilités de régionalisation du système de recherche et d’enseignement supérieur;
    • Il ne dit rien de l’ANR et du pilotage de la recherche sur projets.
    • Les «Initiatives d’excellence» n’étant pas dans le projet de loi actuelle, rien n’est indiqué sur leur devenir.
    • Les FCS subsistent. Les EPCS qui sont le support de certaines Idex seront transformés automatiquement à la promulgation de la loi en «communautés scientifiques».
    • Il menace le rôle national des EPST en ouvrant la possibilité de leur implication dans des contrats régionaux.

Jean-Luc Mazet



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