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Recherche : que les actes soient cohérents avec les discours !

mmSNCS-FSU21 décembre 2004

Le Collectif « Sauvons la Recherche », les syndicats SNCS, SNTRS-CGT, SNESUP.


Fin 2003, le gouvernement annonçait que l’année suivante il n’y aurait pas de postes créés dans les universités et que le nombre de postes dans les organismes de recherche serait diminué de 550. Cette grave décision, ajoutée à des amputations budgétaires brutales, a déclenché un vaste mouvement de révolte du monde scientifique, fortement soutenu par l’opinion publique. En avril 2004, le gouvernement a été forcé de revenir sur ses décisions. Où en est-on un an après ?

Pendant près de 8 mois, la communauté scientifique française s’est mobilisée pour réfléchir à des propositions de rénovation du système de recherche et d’enseignement supérieur. Ces propositions ont été présentées fin octobre 2004 lors des Etats généraux de la recherche (EGR) à Grenoble. Le rapport final est un document unique et incontournable pour plusieurs raisons :

  son mode d’élaboration correspond à une enquête d’une ampleur exceptionnelle, à un travail en profondeur qu’on ne peut renouveler fréquemment.

  la cohérence et la solidité du contenu du rapport sont reconnues par la plupart de ses lecteurs, y compris par le gouvernement.

  ce rapport est fortement soutenu par l’ensemble de la communauté scientifique et bien au délà. Jamais aucun document relatif à la recherche en France n’a eu un tel poids.
Un point fondamental de ce document concerne l’emploi scientifique : toute réforme ambitieuse et efficace de notre système de recherche et d’enseignement supérieur ne pourra être réalisée que si elle s’accompagne d’une programmation de l’emploi scientifique, se traduisant pas la création, chaque année, de plusieurs milliers de postes statutaires nécessaires dans l’enseignement supérieur et la recherche.

Or, que fait le gouvernement ? Tout en reconnaissant l’importance et la qualité des propositions faites par les chercheurs, il prend ou laisse prendre des décisions parfaitement incohérentes avec celles-ci.
Sur l’emploi scientifique (déterminant notamment pour attirer des jeunes vers la recherche et permettre aux jeunes maîtres de conférence de continuer leur recherche) : un nombre dérisoire de recrutements est envisagé dans le budget 2005: 150 créations de postes d’enseignants-chercheurs ! Si le gouvernement ne révise pas cet objectif, cela démontrera qu’il refuse, sur un point clef, de mettre en oeuvre les recommandations des EGR.

Sur les réformes : le gouvernement effectue avec une précipitation peu responsable des choix incohérents avec ceux du document qu’il prétend prendre en compte.

  Ainsi, c’est dans la hâte que le Premier Ministre a décidé en juillet dernier de la mise en place de l’ANR, une agence de financement qui va être dotée de moyens financiers très importants. Elle s’inscrit dans une logique de pilotage de la recherche par le Ministère (mode de fonctionnement fermement condamné par les EGR et … par la Cour des Comptes), sa création dans la précipitation constitue une incitation à dépenser rapidement des sommes importantes en s’appuyant sur un système d’appel d’offre et d’évaluation improvisé. Cela laisse augurer de gaspillages d’autant plus insupportables qu’ils auront lieu dans un contexte de pénurie générale de moyens pour la recherche.

  C’est encore dans la hâte qu’a été lancé un appel d’offre sur des pôles de compétitivité (clôture des appels en février 2005). Les EGR ont proposé la mise en place de PRES (Pôles de Recherche et d’Enseignement Supérieur), sur la base de l’élaboration de collaborations locales entre structures de recherche et d’enseignement supérieur, sur lesquelles pourraient se greffer des entreprises souhaitant bénéficier de cet environnement, le tout avec un souci global d’aménagement du territoire. Le gouvernement veut agir vite, en se préoccupant d’abord d’image et de périphérie (les entreprises) au lieu de bâtir ces pôles à partir de coeurs cohérents d’enseignement-recherche. Cette hâte et cette inversion des priorités risquent là aussi d’entraîner des gaspillages de moyens publics.

  C’est dans la précipitation que certains dirigeants d’organismes de recherche ou de grands Instituts font avancer leur propre projet de réforme, démontrant une conception très managériale de la Recherche. Lorsque des unités décident de s’associer pour réunir leurs forces, mutualiser leurs efforts, former un institut, c’est une bonne chose. Lorsque au contraire, des directeurs d’unités sont sommés de regrouper leurs laboratoires en quelques semaines, qu’ils le souhaitent ou non, cela relève d’une vision purement autoritaire et bureaucratique qui risque d’entraver le travail de recherche. Les EGR se sont aussi clairement exprimés sur ce point. Tout se passe comme si ces responsables d’organismes ou d’Instituts servaient de poissons-pilotes au gouvernement, permettant de tester jusqu’où il est possible d’aller. L’ignorance par les dirigeants d’organisme des aspirations des scientifiques et des conclusions des EGR n’est ni légitime ni acceptable.

Le texte des EGR doit servir de base réelle à l’élaboration de la LOP, et doit le faire non pas par la reprise de tel ou tel fragment, mais dans sa logique globale. Ce ne sera possible qu’en y affectant des moyens financiers et humains importants, bien plus importants que ceux annoncés dans la loi de finances 2005.

Rappelons que, début 2004, la contradiction flagrante entre la réalité vécue dans les laboratoires et les bonnes intentions vis-à-vis de la recherche avancées par le gouvernement et par le Président de la République a constitué un cocktail explosif. En particulier, la question brûlante des moyens à mettre en oeuvre pour attirer les jeunes vers la recherche n’est absolument pas réglée. Après les déclarations sur la recherche, ces derniers mois, de Jacques Chirac, Jean-Pierre Raffarin, François Fillon et François d’Aubert, tout refus de prendre en compte les conclusions des EGR et la défense du bien public fera se dresser la communauté scientifique, qui sera soutenue par ses concitoyens.

Une réforme de la recherche conforme aux souhaits de la communauté scientifique et aux besoins de notre pays aura lieu, tôt ou tard. Une aggravation de la crise sera-t-elle nécessaire pour y parvenir ?

Nous appelons solennellement les responsables politiques et les tutelles à la prise en compte et à la traduction en actes des orientations et propositions issues des Etats Généraux. Nous les invitons à ce que la mise en oeuvre des réformes et la préparation de la LOP se fasse dans un esprit de dialogue avec l’ensemble des acteurs de ces EGR. Pour notre part, nous nous engageons à défendre et porter avec détermination les propositions des EGR et à tout mettre en oeuvre pour avancer dans la construction d’un projet de réforme de la recherche scientifique digne de notre pays.

Le 7 janvier 2005, date anniversaire de l’appel « Sauvons la Recherche », une table ronde réunira publiquement les acteurs des EGR à l’occasion du lancement du livre « Les Etats Généraux de la Recherche ». Nous ferons une demande commune d’audience auprès des deux ministres concernés pour faire le point de la préparation du projet de LOP. Si la prise en compte les recommandations des EGR n’est pas satisfaisante, une action nationale est prévue la deuxième quinzaine de janvier pour en appeler à nos concitoyens.

Signé : Le Collectif « Sauvons la Recherche », les syndicats SNCS, SNTRS-CGT, SNESUP.



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