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Motion : Emploi scientifique

mmSNCS-FSU1 décembre 2002

72 pour – 0 contre – 6 abstentions


Le renouvellement de près de la moitié du potentiel humain des organismes de recherche et de l’université est prévu dans les dix ans qui viennent, dans un contexte de fort risque de pénurie relative de scientifiques dans des disciplines de base, en France comme en Europe.

L’objectif doit être d’attirer une partie des meilleurs étudiants vers les organismes de recherche et les universités et ce, dans un contexte de concurrence difficile avec d’autres activités. Les conditions de thèse, les perspectives d’emploi, la période entre la thèse et le recrutement ainsi que l’âge et le niveau salarial de celui-ci vont jouer un rôle-clef dans cette compétition.

Nos propositions doivent prendre en compte la dimension européenne et ce, non pour mettre en cause notre système de « chercheurs et ITA, titulaires de la fonction publique à temps plein », qu’on retrouve avec des modulations dans quelques autres pays, mais précisément pour le préserver, l’améliorer et l’étendre.

1- Accroître les créations d’emplois dans la recherche et les universités

1-1 Le retard européen en matière de recherche

Dans un contexte d’un rôle croissant de la recherche, les pays d’Europe ont en commun un développement insuffisant de la recherche, publique et privée. Pratiquement tous sont dans une situation contradictoire. D’une part, la pression pour entrer dans le système de recherche ou d’enseignement supérieur demeure forte et s’effectue à un age tardif, ce qui est dissuasif pour ceux des étudiants qui actuellement en deuxième cycle. D’autre part, le nombre d’étudiants en thèse stagne ou chute dans plusieurs disciplines fondamentales. Afficher une politique claire de création et d’emplois scientifiques dans les EPST et Universités et de remplacement des départs est non seulement un impératif de société, c’est aussi la condition indispensable pour garder dans la recherche une partie des meilleurs étudiants.

Atteindre 3 % du PIB pour la recherche (voir annexe 1), à la fin de la décennie suivant les promesses électorales du Président de la République, implique de développer de 6 % par an le potentiel humain de recherche, publique et privée, et d’enseignement supérieur. Cela signifie créer, en plus des remplacements des départs, 6000 emplois par an dans le public et plusieurs milliers dans le privé. A titre d’exemple, il conviendrait de créer plus de 700 emplois de chercheurs et 700 d’ITA chaque année au CNRS (150 à l’INSERM, etc…) et donc d’ouvrir les concours chercheur CNRS avec 1200 postes.

1-2 Un budget 2003 catastrophique

Il est clair que ce n’est pas la politique du gouvernement qui pour la première fois de l’histoire supprime 150 postes de chercheur. Il manque dans le budget 2003, 25 postes d’ITA, 500 d’IATOS, 580 d’enseignants-chercheurs et 275 de chercheurs par rapport au plan pluriannuel du précédent gouvernement, appliqué ces deux dernières années, qui n’était pourtant qu’un « progrès trop modeste ». Au niveau des jeunes docteurs, les possibilités de recrutement dans les statuts du secteur public vont donc chuter de 1000 environ cette année soit une baisse de 25 % par rapport à l’an passé. C’est une politique qui veut s’inscrire dans la durée puisque la ministre a annoncé que le taux de recrutement passerait de 4,5 % de l’effectif aujourd’hui à 3 % pour les années à venir. Si on ne mettait pas cette orientation en échec, le CNRS, par exemple, perdrait 2000 postes d’ici 2010.

1-3 La bataille budgétaire à amplifier

Il n’est pas possible d’accepter ce budget, même s’il est voté par l’Assemblée ; il est hors de question d’attendre septembre prochain pour préparer le budget 2004. D’ores et déjà, le SNCS demande :

 Un collectif budgétaire recréant les 150 emplois de chercheurs qui ont été supprimés et/ou, l’autorisant à recruter des CR sur postes statutaires en utilisant les crédits dédiés aux post-docs.

 Une répartition des crédits dans les organismes qui préserve les crédits des labos et que ceux-ci soient autorisés à utiliser une partie de son Fonds de réserve en fonction des Autorisations de Programme dont ils disposent (et que le gouvernement devra honorer).

Pour 2004, la revendication strictement minimale devra être le remplacement de tous les départs, la création de 400 créations de postes de chercheurs dans les EPST (les 125 prévus au plan pluriannuel sur 2003, les 125 prévus sur 2004 et les 150 supprimés en 2003) et la création de 150 postes d’ITA (les 125 prévus sur 2004 et les 25 qui manquent en 2003 par rapport au plan pluriannuel).

1-4 Le contenu d’une loi pluriannuelle

Bien que rien de tel n’aient été écrit dans le programme de Chirac, il est clair aujourd’hui que le gouvernement entend augmenter l’effort de recherche par l’armée, par l’accroissement des aides au secteur privé voire en comptant sur l’Europe et les régions, mais en laissant stagner ou régresser la recherche publique.

A l’inverse, le SNCS demande une loi pluriannuelle pour la recherche permettant d’atteindre 3 % du PIB à la fin de la décennie par une croissance équilibrée entre les secteurs publics et privés.

 Les demandes directement exprimées par la société en matière de recherche sont toujours plus nombreuses, diversifiées et complexes. Y répondre suppose un effort de recherche accru, en particulier dans la recherche publique sur laquelle repose, notamment, le développement et la transmission des connaissances.

 Comme il est montré dans l’annexe 1, le chiffre global et flatteur de l’effort français en matière de recherche publique (qui inclut le militaire, le nucléaire et l’espace) cache notre position plus que médiocre pour les seuls secteurs des EPST et des universités.

 Une certaine presse fait grand cas de l’affaiblissement de la position française dans les publications mondiales. Mais elle ne dit pas que notre taux de croissance de l’emploi scientifique public est le plus faible, qu’entre 1990 et 2000 la croissance du nombre de chercheurs EPST a été nulle et qu’en deux décennies, les services d’enseignement ont doublé (cf § 6 sur les enseignants-chercheurs).

Il convient aussi de se rappeler que les créations de postes statutaires dans les universités conditionnent les débouchés de nos doctorants comme le potentiel de recherche des laboratoires. Sous cet aspect, les revendications du SNCS, du SNESup et d’autres syndicats impliqués devraient être présentées le moment venu par la FSU. Notre proposition, découlant de ce qui précède, est que les créations d’emploi se situent au niveau de 5 % par an de l’effectif pour les prochaines années et donc de l’ordre de 8-9 % en taux recrutement compte tenu des départs en retraite.

1-5 Diffuser la formation par la recherche dans les autres activités

Mais les recrutements de jeunes docteurs fléchissent aussi dans l’industrie et les services. Pourtant, en France 12 % seulement des cadres et ingénieurs du privé et du public ont une « formation par la recherche » (contre 50 % aux Etats-Unis ou en Allemagne), on ne forme pas trop de docteurs et il n’y a pas trop d’allocations de recherche S’il y a des difficultés de débouchés, c’est que l’industrie et le secteur public ne recrutent pas assez de gens ayant une thèse (surtout en cette année 2003) du fait notamment de l’existence des Ecoles d’ingénieurs et des corps de l’Etat.

Trois mesures sont proposées :

 inciter les secteurs publics et privés à recruter des cadres et ingénieurs formés par la recherche ;

 reconnaître la thèse dans toutes les conventions collectives ;

 ouvrir les corps techniques de l’Etat à la formation par la recherche.

2- Améliorer les conditions de la thèse

2-1 Des conditions matérielles scandaleuses

La situation financière des doctorants, même ayant une allocation, est mauvaise. Leur rémunération est, par exemple, moitié de celle des internes qui, à juste titre, a été fortement revalorisée. Cette situation s’est progressivement dégradée depuis vingt ans.

L’augmentation de 5,5 % de l’allocation de base l’an passé et du même taux cette année ne compense que très marginalement cette dégradation. Mais malheureusement, la petite amélioration de cette année a été « financée »

par la suppression de 750 monitorats. Il y avait 2700 possibilités pour la précédente promotion d’allocataires et 1950 seulement cette année, si bien que le revenu moyen des allocataires (en totalisant ceux avec et ceux sans monitorat) recrutés cette année baissera.

L’objectif doit être d’atteindre rapidement un montant de l’ordre de 1200 € nets sans monitorat et de 1500 € nets en incluant une activité de monitorat, compatible avec le travail de thèse, pour tous ceux qui le souhaitent ce qui suppose d’en ouvrir plus de 3000 par an. Toutefois, ces monitorats ne sauraient servir de prétexte pour ne pas créer de postes de MC. C’est pourquoi, ils pourraient être diversifiés quant à leur contenu, par exemple en les développant dans le secteur important de la diffusion des sciences (préparation d’expos, rapport avec des classes de lycée, etc.). De plus, pour éviter la dépréciation des allocations observée les vingt dernières années, leur montant devrait être indexé sur les prix.

Diverses « bourses de thèse » des régions ou des fondations, ne donnent pas, à l’inverse des allocations de recherche, un statut de salarié. Le montant de ces bourses devrait être aligné sur ce taux minimum et surtout sur les garanties sociales données par les allocations de recherche du ministère (retraite, chômage, couverture sociale). Un effort aussi devrait être fait au niveau des DEA, par exemple, en rémunérant les stages. Le SNCS s’adressera aux financeurs de ces bourses comme aux gestionnaires de celles-ci pour présenter ces revendications.

2-2 Un allongement regrettable et injustifié de la durée des thèses

Il faut aussi briser la spirale de la durée croissante des thèses et revenir, progressivement, à une durée de trois ans, c’est-à-dire la durée de l’allocation. Ainsi en une dizaine d’année la longueur des thèses en physique et chimie s’est accrue de près d’un an, la durée en SDV dépasse 4 ans en moyenne et au-delà en SHS. Il faut expliquer que passer une ou deux années de plus en thèse, années mal ou non payées, ne créera aucun emploi supplémentaire, mais retardera seulement l’age moyen de recrutement. Bien sûr, il conviendra d’agir progressivement, et même très progressivement dans le secteur SHS où les conditions des jeunes sont particulièrement dramatiques. De plus, des exceptions sont à faire pour des sous-disciplines particulières ayant un temps de travail expérimental exceptionnellement long ou les disciplines « de terrain ».
2-3 L’amélioration des conditions de la thèse

Cela suppose, d’améliorer les conditions de la thèse et d’assurer partout un encadrement réel et donc de limiter le nombre de thèses dirigées par une même personne (plus de dix n’est actuellement pas rare). Nous devons aussi être attentifs au fait que les jeunes docteurs ont vocation à être recrutés dans la recherche publique, l’enseignement et dans d’autres secteurs. Il pourrait aussi être recommandé aux Comités d’évaluation des laboratoires de s’intéresser, comme le font déjà certains, de la durée des thèses et des conditions d’enca-drement.

Il conviendrait aussi que soit négocié entre tous les intéressés, au niveau national, un contrat-type signé par le doctorant, l’Ecole doctorale et le laboratoire qui précise les droits et devoirs de chacun pour assurer une bonne formation. Ce contrat pourrait être élaboré à partir des diverses « chartes des thèses » dont les contenus sont malheureusement par trop hétérogènes et dont certaines contiennent des limitations inacceptables sur le droit de publication du doctorant. La durée de la thèse devrait être abordée dans ce contrat dans l’esprit expliqué ci-dessus, mais en prenant en compte le cas de ceux qui font leur thèse avec un autre emploi salarié. Il conviendrait aussi de doter chaque doctorant d’un tuteur extérieur au laboratoire capable d’intervenir en cas de problème.

Enfin, il doit être mis fin à la pratique illégale, qui s’instaure dans certaines universités, d’exiger plusieurs publications pour autoriser la soutenance de la thèse; la thèse n’est qu’un apprentissage de la recherche.

Enfin, il convient d’observer que des doctorants effectuent leur thèse sans ressources. Il conviendrait à partir des données de l’OST ou des Ecoles doctorales, d’évaluer leur nombre et de les défendre.

3- Aménager la période entre thèse et recrutement

Chacun le sait, la période qui suit la thèse, qui est particulièrement angoissante pour les jeunes, n’est souvent pas financée. Les seules solutions sont le stage à l’étranger (souvent impossible pour raisons personnelles), les ATER post-thèse ou les quelques bourses post-doctorales des EPIC ou des Fondations. De ce fait beaucoup de jeunes vivent sans ressources après la thèse, parfois avec quelques débris de vacation ou de contrat, ou pire, en continuant à travailler en touchant le chômage, solution qu’en aucun cas un syndicat peut encourager.

Il est proposé, en s’inspirant du système des ATER post-thèse, de donner droit à un an d’allocation de stage (renouvelable une fois) juste après la thèse, pour permettre à chacun de présenter les concours dans une situation d’égalité de chances. Ces nouveaux contrats seraient gérés par les organismes.

Afin d’agir concrètement pour freiner l’allon-gement de la durée des thèses et limiter la durée de la période entre thèse et recrutement, il est proposé deux mesures :

 que l’attribution de ces nouveaux contrats soient conditionnés à une durée maximale de la durée de thèse qui pourrait être transitoirement fixée par discipline (par exemple qu’en physique et chimie la thèse soit déposée après 3 ans de travaux) ;

 que la session de recrutement dans les organismes ait lieu en automne de façon à ce que le dépôt de la thèse en juin figure dans le dossier (rappel : selon le statut des personnels des EPST, le passage de la thèse n’est pas un impératif pour se présenter au concours chercheur).

4- La dimension européenne, les statuts et les post-docs

4-1 Contre une politique remplaçant les CR et MC par des post-docs

 La création de 400 positions de post-docs accompagnée de la diminution de 1000 possibilités de recrutement de « statutaires » cette année n’est pas seulement la conséquence de choix budgétaires. Cette mesure correspond à une demande forte de forces qui souhaitent une politique de post-docs et de ne recruter dans les statuts qu’à 35-40 ans en supprimant les recrutements CR2 et MC2, voire pour certains, en ne recrutant qu’au niveau DR2 ou PR2. Dans un contexte où nous considérons que l’âge actuel d’entrée moyen est déjà trop élevé, le SNCS estime qu’il s’agit là d’une attaque frontale contre les statuts existants. Il combattra pour obtenir une augmentation significative de nombre de postes ouverts au concours de CR2 et MC2 qui devraient se situer aux environs de 8 % par an de l’effectif (cf § 1-4).

 Cette orientation, directement inspirée du modèle américain, ne prend pas en compte que, du fait de leur domination financière, politique, scientifique et militaire, les Etats-Unis peuvent drainer les meilleurs post-docs du Monde entier, pillant au passage la matière grise des pays en voie de développement. Elle ne prend pas non plus en compte qu’aux Etats-Unis on peut faire une bonne carrière dans l’industrie en étant recruté à 35 ans, alors que l’industrie européenne recrute jeune et encore plus en France du fait des Grandes Ecoles.

 Enfin, dans de nombreuses disciplines et dans un contexte où on va manquer de scientifiques, ce modèle conduira à effectuer une sélection à rebours. A l’exception de quelques sympathiques illuminés, on ne recrutera que ceux dont n’a pas voulu le secteur privé. Cela est vrai pour la physique et la chimie mais cela commence à arriver en biologie, avec un début d’essor de ses débouchés industriels.

4-2 La dimension européenne

La situation des pays européens est très disparate. Certains comme l’Espagne ou l’Italie ont certaines structures proches de celles de la France même si les gouvernements de droite veulent les mettre en cause.

L’Allemagne est intermédiaire ; elle possède des instituts de recherche avec des chercheurs statutaires à temps-plein ; après avoir beaucoup fonctionné sur des post-docs durant une période, elle se met à recréer des postes statutaires pour attirer les jeunes. Des pays comme la G-B ou l’Irlande font par contre un véritable dumping par les hauts salaires des post-docs, mais ont un secteur public de recherche faible.

Cette situation a des conséquences indirectes pour nous car les post-docs payés par les pays à secteur public faible (recrutés notamment dans les pays de l’Est), postulent vers 35-40 ans sur les emplois de titulaires des autres pays si bien que nombre de nos propres doctorants se voient barrer la route en France. Ainsi, en SDV-CNRS le quart des chercheurs recrutés sont étrangers, ce qui montre clairement l’attractivité de notre système. Si bien sûr nous sommes heureux de recruter des chercheurs européens, le problème est l’absence de réciprocité puisque les jeunes docteurs français ne peuvent avoir d’emplois dans les pays à secteur public faible et sont donc pénalisés.

Il y a donc intérêt à tout faire pour avoir une action commune dans les pays européens pour homogénéiser les salaires des post-docs (éviter le dumping), se battre pour que dans tous les pays des emplois statutaires, ouvert aux jeunes docteurs, soient en nombre suffisants. Il s’agit là de conditions pour favoriser les échanges et les coopérations sur une base saine et équilibrée.

4-3 Revenir à la définition du post-doc

Le SNCS ne confond pas une « politique de post-docs » conduisant à remplacer le grade de CR2 voire de CR1 et l’intérêt scientifique d’un séjour dans un autre laboratoire après recrutement sur poste statutaire.

Il conviendrait en particulier de revenir la signification du post-doc. Ce ne doit pas être seulement une ligne pour un CV de concours. Cela doit être d’abord une formation liée au développement du thème de recherche de l’individu ou du laboratoire. S’il n’est fait avant recrutement, le post-doc pourrait se faire après et dans le cadre de coopérations entre labos européens ou autres en fonction des souhaits du chercheur.

Des procédures au niveau européen souples, rapides et, au demeurant, peu onéreuses devraient aider ces échanges et coopérations. De même, dans ce même cadre coopératif, tout doctorant devrait avoir la possibilité d’effectuer, sur son sujet et financé par l’Europe, un stage de l’ordre trois mois dans un labo européen avec les financements et protection sociale ad hoc.

5- recruter plus jeune

5-1 L’âge moyen d’entrée actuel

Il est scandaleusement élevé. Au CNRS en 2000, l’âge moyen d’entrée 30,4 ans pour les CR2 et 35,8 en CR1. Il existe de fortes variations par discipline pour les CR2 : physique, 29 ans; chimie, 29,7 ans; SDV, 31,4 ans; SHS, 32 ans. A l’INSERM en 2000, l’âge moyen est de 30,3 ans pour les CR2 et 35 pour les CR1. Dans l’université, l’âge pour MC est 33,6 ans en 2001 : maths/informatique, 30,7 ans; physique, 29,3 ans; chimie, 30 ans; biologie, 32,3 ans; lettres, 37 ans.

Cet age d’entrée s’est fortement accru en trois décennies : on « entrait » en 1965 « pour faire une thèse » et encore en 1975, juste après la thèse.

5-2 Les conséquences

Quand on est recruté dans le public à 33/34 ans en moyenne, cela a pour conséquence que les jeunes vivent six à sept ans « hors-statut », ou post-doc après l’age qui devrait être celui de la thèse. Pour les non recrutés , cette politique conduit à les mettre sur le marché du travail à 30, 32 voire 35 ans; car ils seront alors trop « vieux » pour faire carrière dans le secteur privé. Un véritable gâchis.

Par ailleurs, payer actuellement 12 000 F/mois pour un niveau Bac + 12 ou 13 est une forme de dévalorisation de notre activité. La dérive de l’âge d’entrée a conduit une dévalorisation des salaires par rapport à la qualification des individus 12 000 F/ mois c’est bien pire à 31 ans qu’à 27.

5-3 Propositions

 Il faut assurer en fonction de la qualification acquise après la thèse une pluralité de voie d’entrée dans les organismes : CR2, CR1 et DR2.

 Le gros du recrutement (de 60 à 80 % suivant les secteurs) devrait refaire entre thèse et thèse +2.

 La voie CR1 devrait correspondre à une qualification supérieure (double cursus, passage par enseignement ou le privé) ou à des séjours dans des laboratoires étrangers d’au moins trois ans.

 Enfin, au-delà de sept ans, il convient de recruter directement DR2. Les départs en retraite doivent permettre, si les postes ne sont pas supprimés, de procéder ainsi sans nuire aux promotions.

Il n’a pas semblé utile à la majorité de la commission de proposer des modifications statutaires correspondant à ces propositions dans le contexte actuel. Gagner la bataille de la création de postes statutaires dans les EPST et Universités est un préalable. Sinon, toute solution y compris le statu quo, conduira à un nouveau vieillissement à l’entrée (voir annexe 2).

6- Rendre les carrières attractives

6-1 A propos d’une directive du Directeur de l’INSERM

Une initiative du directeur de l’INSERM justifie l’ampleur de la réhabilitation des carrières que nous demandons dans la suite. Il crée en effet un système de primes, telles « les contrats d’interface », qui constitue un complément de salaire atteignant 1000€ par mois soit environ 40 % du salaire d’un CR. Si cette création donne un ordre de grandeur juste des augmentations nécessaires des salaires, la modalité proposée est totalement condamnée par le SNCS :

  par la limitation de la mesure à un petit nombre de chercheurs, triés sans transparence par des comités ad hoc,

  par les tensions qu’elle suscitera tout en niant le travail d’équipe,

  par la nature des primes, sans droits sociaux.

6-2 Les salaires de recrutement, les validations

 Sur les débuts de carrière, il faut avoir pour objectif qu’un CR2, un IR ou un MC2 débute à 2200 € /mois pour un recrutement juste après la thèse un niveau thèse avec répercussion sur le reste de la carrière. Ainsi, le recrutement CR1 devrait être au minimum de 2800 €/mois.

 Toutes les années d’activité en rapport avec la recherche ou l’acquisition d’une compétence utile à celle-ci, effectuées avant recrutement en France ou à l’étranger, devraient être validées à 100 %. Ce problème concerne aussi les ingénieurs, pour lesquels les validations de service sont encore plus limitatives, ainsi que les enseignants-chercheurs.

 Le syndicat devra rechercher un accord sur ces problèmes au sein de la FSU et demandera l’ouverture de négociations au sein des organismes.

6-3 Le déroulement des carrières chercheur

 Les corps de chercheur CR et DR devraient être fusionnés, le corps unique des chercheurs, qui correspond mieux au continuum existant dans leur travail, comporterait les cinq classes actuelles.

 L’âge de passage au corps des DR devrait se situer, en moyenne 10 ans après la thèse. Il convient de rappeler que le passage DR2 est un niveau, basé sur une pluralité de critères (résultats, encadrement, rôle dans le labo) qu’on peut franchir entre 30 et 65 ans. Eliminer des candidats parce qu’ils ont plus de cinquante est d’une débilité profonde qui ne prend pas en compte le rôle social que jouent les CR1 confirmés dans les labos. Le SNCS demandera aux directions de faire ce rappel statutaire dans toutes les sections scientifiques.

 Les proportions entre le nombre des DR2/DR1/DRE devraient être alignées sur celles entre PR2/PR1/PRE.

Il n’y a aucune raison que le syndicat laisse les carrières dans l’état actuel de dévalorisation ce qui déprécie de plus notre activité sociale. Il chiffrera les besoins en promotions qui découlent des principes précédents. Il devra organiser sous toute forme réaliste des actions à ce sujet (pétitions en contactant tous les candidats aux passages de grade ou de classe, motions des instances scientifiques, etc.).

7- Défendre et intégrer les hors-statuts et les CDD

7-1 Recenser

Notre premier travail va être de recenser tous les hors-statuts qui ont été créés par vagues successives ou qui seront créés cette année : personnels payés sur contrats, sur des fondations, sur des vacations, CDD liés au dernier concours du CNRS, nouveaux CDD créés cette année, etc. Il serait aussi intéressant de connaître les conditions statutaires des gens travaillant autour des génopôles (certains ont un statut correct de droit privé lié à la convention collective de la pharmacie mais pas tous).

Pour agir avec eux, il conviendra d’en connaître les adresses mèl. Si on veut stopper la politique de CDD remplaçant les postes statutaires, il n’y a qu’une stratégie possible : il faut que le bordel que cela crée soit supérieur aux avantages que le gouvernement en tire.

7-2 Intégrer

Le SNCS considèrera que, deux ans après la thèse, tout chercheur ou ingénieur travaillant sur un emploi de caractère permanent devra être intégré dans un cadre statutaire qui lui est adapté, après avis des instances scientifiques compétentes. Il demande une enquête sur le nombre de hors-statuts ou CDD soit menée dans chaque organisme et qu’un plan d’intégration soit réalisé.

7-3 Défendre

Transitoirement, le SNCS demandera que tous les CDD et hors-statuts bénéficient de la même couverture sociale que les salariés et que leur qualification soit reconnue. L’exemple donné dans l’annexe 4 d’un licenciement après

13 ans de CDD, montre que cette problématique est bien réelle.

8- Améliorer l’exercice du métier

La capacité d’attirer les jeunes vers la recherche dépend aussi beaucoup de l’attractivité du métier lui-même.

8-1 La liberté d’initiative, les moyens de travail

Même si c’est une évidence, il faut rappeler que le choix des métiers de recherche est souvent lié à la nature du travail et à la liberté d’initiative qu’il devrait donner. La multiplication des contrats, le temps perdu pour les rechercher, la multiplication des contraintes et la paperasserie ont conduit à une profonde dégradation de la situation. Des moyens de travail décents et des critères d’évaluation reposant d’abord sur la qualité et l’originalité du travail sont donc des éléments essentiels.

C’est pourquoi, le SNCS revendique :

 une augmentation des crédits récurrents des laboratoires leur permettant de fonctionner correctement (au moins 80 % de leur budget de fonctionnement).

 la couverture intégrale des AP votées par des CP. Cette année, les organismes vont faire de la « cavalerie » pour pouvoir fonctionner. Il est urgent que l’Etat respecte ses engagements.

8-2 Les enseignants-chercheurs

Il ne sera pas traité ici des aspects quantitatifs et qualitatifs directement liés aux besoins d’enseignements, ce qui sont très directement du ressort du SNESup, mais d’aspects liés à la recherche qui nous concernent aussi. Les discussions entre nos deux syndicats pourraient porter sur : (i) ramener à 150 heures les services d’enseignements pour tous ceux qui effectuent de la recherche, (ii) décharger d’un tiers de service pendant trois ans les jeunes MC2, (iii) développer notamment des postes d’accueil à mi-temps, proposées par des instances scientifiques nationales d’organisme, sur quatre ans.

8-3 Les ingénieurs

Il est nécessaire de tirer toutes les conclusions du constat qu’il existe 3 métiers post-thèse de même niveau de qualification et d’utilité complémentaire pour la recherche. Même s’il y a des modes d’insertion différents des ingénieurs dans le processus de recherche (entre ceux sur les grands appareils et ceux dans les labos), il faut assurer une égalité avec les chercheurs sous divers aspects :

  la reconnaissance de l’importance de leur rôle,

  leurs droits dans le travail (à l’initiative, à publier, à aller dans les congrès, à défendre son activité par un rapport),

  leur place dans les décisions du laboratoire ou dans les instances ; par exemple au Comité national, un IE docteur devrait voter sur les même classements qu’un CR et un IR0 devrait voter sur les même choses qu’un DR1,

  L’égalité des validations de service avant recrutement.

9- Conclusion

  Le problème de l’emploi, des conditions matérielles et scientifiques des jeunes et de l’attractivité des carrières doit être l’axe central de l’activité du SNCS. Ces problèmes sont aussi centraux pour le développement de la recherche.

  Le SNCS s’adressera aux jeunes scientifiques, qu’ils soient allocataires, CDD ou statutaires avec un matériel spécifique et fera un gros effort de syndicalisation.`

  Il travaillera en relation avec les autres organisations et les associations de jeunes scientifiques pour aller vers des actions fortes sur le problème de l’emploi scientifique. g

ANNEXE 1 : RECHERCHE PUBLIQUE ET PIB

Si la recommandation européenne de porter à 3 % la part de la recherche dans le PIB estime que, en moyenne c’est en faisant porter pour les 2/3 l’effort sur le privé et 1/3 sur le public, le programme de Chirac ne reprend pas ces proportions. Il reste que ce gouvernement, comme le précédent, insiste sur le bon financement par l’Etat de la recherche publique au regard des autres pays d’Europe. Comme je l’avais développé dans un texte du Conseil Supérieur (CSRT), qui l’a voté, cela est faux pour plusieurs raisons.

  La France, avec la GB voire la Suède, consacre de l’ordre de 20 % des crédits publics à la recherche militaire, si bien que sa position pour la recherche publique civile est médiocre.

  Des activités comme le nucléaire ou l’espace sont relativement plus financées par l’Etat en France (CEA, CNES), alors qu’elles sont principalement financées par le privé (ou inexistantes) dans d’autres pays. Cela accroît artificiellement le poids comparé de la recherche publique en France.

  A l’inverse, dans certains pays (GB) le financement de la recherche publique est sous-évalué. Les laboratoires publics reçoivent près du quart de leurs budgets, avec une bonne partie des salaires des personnels, de Fondations privées (souvenez-vous de la fondation Wellcome Trust qui était prête à financer pour 3 milliards de francs Diamond/SOLEIL). Ces crédits sont considérés comme privés. Or les donations sont fortement dégrevées d’impôts qui sont des crédits publics potentiels.

Annexe 2 ; Faut-il donner un contenu statutaire à « recruter jeune » ?

Trois propositions statutaires sont possibles. Mais il n’a pas semblé utile de rentrer dans un débat qui divisera le milieu à un moment où il faut le rassembler pour la bataille pour l’emploi.

1- Le statu quo.

A supposer que le plan pluriannuel ait été respecté et étant donné la baisse du nombre de thésards, le système actuel aurait pu conduire à une lente baisse de l’age d’entrée. Mais si le gouvernement réduit à 3 % le taux de recrutement, l’age d’entrée va monter. Ce d’autant que, comme à l’INSERM, un directeur d’orga-nisme peut accroître progressivement la proportion réglementaire CR1/CR2 au recrutement.

2- Lever la limite d’age à l’entrée ou fusionner CR1 et CR2.

Ces deux propositions reviennent au même dans la pratique. On a déjà connu cette situation vers 1980. On observait alors partout une forte tendance au vieillissement ; l’age moyen d’entrée CR2 en SHS était de 43 ans. Dans le contexte européen où des pays fonctionnent sur post-docs avec un emploi scientifique public faible (GB, Irlande, etc.), et le stock de post-docs des pays de l’Est qui vont vouloir atterrir un jour sur un emploi fixe, on va avoir une inflation sur le niveau des dossiers. C’est aller vers un recrutement à plus de 35 ans en moyenne.

3- Placer des conditions pour chaque grade.

Théoriquement, le système reconnaissant le mieux les qualifications, le plus favorable pour les carrières et assurant un rajeunissement réel serait d’assurer un pluralisme officiel de niveaux de recrutement avec des conditions pour chaque grade. Ainsi, entre thèse et (thèse+2) on entre CR2 avec un pourcentage d’entrée à ce niveau (60 à 80 % suivant les disciplines). Au-delà, on entre CR1 avec validation de toutes les activités précédentes. Enfin, il faudrait avoir des possibilités réelles de recruter DR2 au-delà de 35 ans et si le dossier est au niveau DR.

Dans un contexte de progression, même modérée de l’emploi public, une telle solution pourrait être facilement en place mais progressivement afin de faire disparaître les files d’attente. Dans le contexte actuel, cette solution est impossible à mettre en œuvre car elle enlèverait toute chance à une génération. On est ramené, dans le contexte actuel, au seul problème des créations de postes statutaires.

Annexe 3 : le problème des astreintes

La section de LURE a déposé le texte suivant. La commission l’a approuvé. Mais lors de la discussion devant le Congrès, il a été convenu qu’une CA le votera, après modifications s’il y a lieu.

Annexe 4 : un exemple de licenciement scandaleux après 13 ans de CDD.

Annexe 5 : le manque d’allocations

Le rapport du Ministère sur les études doctorales 2001 montre que 37 % des doctorants n’ont pas de financement. Ceux qui ont un emploi salarié ne sont pas décomptés dans ces 37 %. Cela montre que qu’il convient d’augmenter fortement le nombre d’allocations.

Poids des « sans financement » par discipline d’Ecole Doctorale :

*Monodisciplinaire
Math-info 9%
Physique et science pour l’ingénieur 7%
STU 16%
Chimie 4%
Biologie 6%
Sciences de l’homme et des humanités 68%
Sciences de la société 62%

*Multidisciplinaire
Math-info-physique-SPI-chimie multidisciplinaire 6%
SHS multidisciplinaire 56%
Math-info-physique-SPI-chimie et biologie 8%
Math-info-physique-SPI-chimie et SHS 36%
Biologie et SHS 23%
ED de site 29%

Total 37%

Paru dans la VRS N°352 de décembre 2002



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