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Les coordination de doctorants et la position du SNCS (09/04/09)

mmSNCS-FSU23 mars 2009

Après la première et deuxième coordination des
doctorants (textes ci-dessous)

Analyse et propositions sur la situation des doctorants

Par Henri-Edouard Audier, membre du BN du SNCS-FSU

Le texte qui suit a un seul but : celui de créer les conditions s’une bataille commune de toutes les catégories dans les laboratoires. Il se situe en amont des revendications immédiates légitimes des doctorants qu’il tente de les replacer dans une perspective à terme. Il est écrit après la réunion de la « première coordination » (conclusions ci-dessous) qui, à juste titre, a montré que problème des doctorants dépassait largement celui du CDU (motion de la CA du SNCS ci-dessous) Le problème des précaires post-doctoraux n’est pas traité ici.

Une adaptation aux besoins du marché ou du pays ?

Du point de vue du gouvernement, pourquoi avoir plus de diplômés, rendre la recherche attractive, former plus de docteurs si notre économie ne les absorbe pas ? D’où, la nouvelle mission d’insertion des universités dans la LRU, avec pour « indicateur » le placement dans un premier emploi, ce qui revient à une adaptation étroite aux « besoins » immédiats, c’est-à-dire au marché. Et si le problème était inverse ? Et si nous n’avions pas une politique gouvernementale de la formation, un secteur privé, une volonté politique capable de répondre aux grands enjeux de l’avenir, qu’ils soient économiques, sociétaux ou culturels ?

La France ne forme pas assez de doctorants

Le nombre de docteurs formés placent la France en queue des pays développés. Elle ne forme que 10 000 docteurs par an, le Royaume-Uni en forme 15 000 et l’Allemagne 25000. Si leur nombre stagne depuis dix ans, phénomènes positifs, le taux d’étrangers est passé de 25 % à 35 % en dix ans et celui des femmes a fortement monté (45 % aujourd’hui contre 20 % en 1992, mais elles ne sont que 24 % en sciences « dures »). A contrario, ces chiffres ont deux conséquences négatives. D’une part, nous ne formons que 6 500 docteurs français. D’autre part, le nombre de « docteurs français males » a baissé en nombre absolu, signe fort de la baisse d’attractivité du doctorat.

Choisir entre le malthusianisme et le chômage des jeunes ?

La France est l’un des pays où la proportion de cadres, du privé comme du public, qui ont une thèse, est le plus faible, du fait des écoles. Ce taux tourne autour de 10 %, soit quatre fois moins qu’aux Etats-Unis et en Allemagne. Mais, c’est le paradoxe français, en formant moins de docteurs que les autres, en ayant que peu de docteurs qui irriguent les activités sociales, la France a un taux de chômage de ceux-ci, trois ans après la thèse, qui est proche de celui des non-diplômés. Après avoir sélectionné les meilleurs étudiants, après une thèse qui dure souvent plus de quatre ans (voire six en SHS), plus du tiers d’entre eux est au chômage ou en CDD … trois après la thèse.

Cette politique sacrifie à la fois les jeunes et l’avenir du pays, le nombre d’étudiants en masters recherche baisse : une étude récente prévoit une chute de 33 % en dix ans du nombre de doctorants http://www.sncs.fr/article.php3?id_article=1460. Autant dire qu’un autre gouvernement n’aurait plus le nombre de docteurs nécessaires pour redresser rapidement la situation, s’il le souhaitait. On ne peut sortir du dilemme, « malthusianisme » dans le nombre de docteurs formés ou « chômage des jeunes », qu’en mettant au centre la bataille des débouchés, donc de la politique économique et sociale. En ce sens, la lutte des doctorants s’inscrit dans celle de tous les acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche et, au-delà dans celle des grandes centrales syndicales (19 mars).

Le problème central des débouchés

L’enseignement supérieur et la recherche.

Inutile ici d’épiloguer. Au-delà de la nécessaire croissance du potentiel, donner aux E-C plus de possibilités de recherche (nombre d’heures, accueil, etc.) demande déjà environ 20 000 emplois. L’argent existe : 15 milliards du « paquet fiscal », 3,5 milliards de Crédit d’impôt, trois milliards pour la diminution de la TVA sur la restauration. La création de 5 000 emplois par an coûterait 300 millions. En plus, le transfert de 300 millions de l’ANR pour recruter sur des emplois de titulaire les CDD actuels, libèrerait la voie aux actuels doctorants. Rien de cela dans le plan de relance. Un plan pluriannuel devrait intégrer les emplois à créer, la résorption de la précarité, l’attractivité des carrières, mais aussi, en cohérence, une forte augmentation du nombre d’allocations.

Le secteur industriel et privé

Malgré la modestie du recrutement public, le privé ne recrute que le tiers des doctorants. Il ne s’agit pas de nier la validité de la formation d’ingénieur, mais d’affirmer que plus de diversité dans les recrutements par les entreprises apporterait un « plus » en intégrant la recherche dans la stratégie de l’entreprise. Or, « la part des chercheurs ayant un diplôme universitaire (entre autres les docteurs) diminue. Elle représentait 48 % des embauches en 2000, elle ne s’élève plus qu’à 38 % en 2004 » (Rapport Guillaume). Plus précisément, les docteurs ne représentent sur 13 % des chercheurs recrutés par les entreprises ! C’est toute l’aide au privé et la fiscalité sur les entreprises qu’il faut repenser (en limitant le crédit d’impôt aux PME) de façon qu’elles entraînent un réel développement de la recherche et soient porteuses de créations d’emplois et de création de richesses *.

L’administration et les services

Du fait des corps de l’Etat et des écoles, nombre de fonctions techniques sont de fait inaccessibles aux docteurs ; des voies d’accès via la recherche doivent créées. Dans les services, les firmes recrutent en fonction d’une employabilité immédiate et d’un petit savoir faire (écoles de gestion), alors qu’aux Etats-Unis, elles considèrent le niveau de qualification. En SHS comme ailleurs, le problème passe par la remise à plat du système des écoles et de leur intégration dans les universités.

Une durée excessive de la thèse

On en arrive à des mots d’ordre de cette première coordination qui mériteraient qu’on discerne plus clairement la défense légitime des doctorants actuels et une politique future du doctorat : « arriver à terme au financement de toutes les thèses », « Le maintien de la possibilité de s’inscrire en thèse sans financement », « Une durée de financement adaptée aux spécificités disciplinaires », « Le droit de réinscription en thèse sans limitation de durée ».

Un aspect central est la durée de la thèse. Même si la dérive vers l’allongement semble arrêtée, la durée moyenne de soutenance est de 3,5 ans en sciences « dures », 3,9 en biologie et cinq ans en SHS, avec de très fortes variations entre disciplines. L’age médian de soutenance est de 28 ans en sciences « dures », 29 en biologie et 33 en SHS, ce dernier chiffre étant à relativiser vu qu’un tiers des thèses SHS sont « tardives » (salariés faisant une thèse).

Cette durée est excessive : en principe la thèse est un apprentissage de la recherche (et ne suppose même pas de résultats nouveaux !). Elle devrait avoir une durée maximale de quatre ans, même si des exceptions pourraient être admises pour quelques rares sous-disciplines, quand scientifiquement justifié, ou pour les doctorants ayant un autre travail.

Cette durée trop longue a plusieurs conséquences notamment elle contribue à l’âge trop tardif de recrutement, tout particulièrement dans les disciplines où la thèse est longue. Comment se battre contre 4 ou 6 ans de CDD après la thèse en sciences « dures », si au même âge des collègues du SHS sont encore doctorants ? On ne peut pas encourager le fait d’être doctorant à 33 ans quand on demande un recrutement stable « au plus près de la thèse », au pire 5 ou 6 ans après le début de celle-ci. La deuxième conséquence est que c’est un handicap de plus pour le recrutement dans le privé qui a l’habitude de recruter, jeunes, les élèves des écoles. La troisième est que cela conduit à un nombre important de doctorants non payés : dans le secteur SHS notamment. Celui-ci représente 37 % des thèses, 32 % des allocataires, mais 58 % des doctorants, dont 60 % ne sont pas payés.

Les conditions du doctorat

Pour poursuivre sur le secteur SHS, la longueur de la thèse est souvent lié à l’absence trop fréquente d’équipes structurées et/ou d’un encadrement suivi (faible nombre d’HDR) : on a vu des enseignants « diriger » des dizaines de thèses, même si récemment les Ecoles doctorale ont limité les dégâts. De ce fait le taux d’abandon en cours de thèse dépasse 50 % en SHS (le taux demeure élevé, y compris parmi les allocataires) contre 15 % ailleurs. Peut-être faut-il adapter la Charte des thèses, mais ce qui semble plus important est de généraliser les meilleures pratiques des Ecoles doctorales, notamment une commission paritaire enseignants-doctorant pour résoudre problèmes, y compris par changement de laboratoire.

Le financement

Le doctorant est à la fois « en formation à et par la recherche » et producteur scientifique. Il doit avoir un statut de salarié avec droits sociaux et droit du travail. C’est ce que reconnaît la Charte européenne. Le montant des allocations doit être unique, indexé sur la fonction publique, laissant choisir l’étudiant en fonction de l’intérêt du sujet, de l’ambiance du labo et non du montant de l’allocation, ce qui favoriserait systématiquement les universités riches.

La reconnaissance

Si la reconnaissance de la thèse dans les conventions collectives est un impératif, le gouvernement refuse toujours de prendre cette qualification en compte pour le niveau des grilles de salaires, et même souvent dans la prise en compte des années d’allocataires dans la « reconstitution de carrière ».

Chacun aura donc compris que la phrase préférée de Sarkozy n’est que pure démagogie :

« Il faut que cesse ce gaspillage incroyable pour la France qui consiste à fournir aux laboratoires étrangers de jeunes scientifiques parmi les meilleurs du monde ».

* Note : ce sujet nécessite un article en lui-même. La proposition fréquente d’exonérer d’impôt le recrutement d’un docteur n’a pas de sens : elle est déjà en place (60 % du salaire et des moyens de travail pendant deux ans au travers du Crédit d’impôt).

Motion de la CA du SNCS du 6 mars 2009 : sur le Contrat doctoralLa première coordiation nationale des doctorants



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