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Le budget 2017 conclut, pour la recherche, un quinquennat pour rien.

mmSNCS-FSU4 novembre 2016

SNCS Hebdo 16 n°6 du 4 novembre 2016


sncshebdo2016no6.pdf


Le projet de loi de finances pour l’année 2017 est actuellement examiné par l’Assemblée nationale. Le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR) y connaîtrait sa plus forte augmentation annuelle depuis 2008, avec + 4,3%, le budget de la recherche augmentant pour sa part de 2,5%. Ce projet de budget montre que le gouvernement est capable de trouver des ressources pour financer ses choix politiques. Néanmoins, quand il s’agit des priorités de la communauté scientifique, cela fonctionne beaucoup moins bien …

Boris Gralak et Christophe Blondel, membres du bureau national du SNCS-FSU



Pour le budget de la recherche, l’année 2008 peut être choisie comme référence. Toute comparaison avec les années précédentes serait biaisée car le périmètre de l’ESR a évolué significativement en 2008 avec la consolidation d’environ un milliard d’euros supplémentaires sous le libellé « Actions incitatives et soutien à l’innovation ». C’est l’Agence nationale de la recherche (ANR), alors à son apogée, qui était introduite discrètement dans le périmètre budgétaire de l’ESR … D’après les chiffres de l’INSEE pour le PIB national, l’ESR est passé de 1,167 % du PIB en 2008 à 1,173 % du PIB en 2016, soit une progression de 0,00075 % par an. Pour atteindre à ce rythme l’objectif de 3% du PIB consacré à la R&D en partant de 2,26 % actuellement – en supposant qu’on augmente parallèlement les efforts publics et privés de 33 % – il faudrait 512 ans. Heureusement, l’augmentation « extraordinaire » du budget de l’ESR projetée en 2017 permettra, si le taux est maintenu, d’atteindre l’objectif presque cinq fois plus rapidement, dans 103 ans !

Le projet de budget 2017 de la recherche (tel que présenté au CNESER du 17 octobre†) affiche une progression de 191 millions d’euros (M€) en crédits de paiement, principalement répartie en + 49 M€ (+8,33 %) pour l’ANR, + 136,4 M€ pour les opérations scientifiques internationales (OSI : CERN, ESA, ITER…) soit + 12,7 %, + 17,3 M€ (+ 103 %) pour les contrats de plan État-Région (CPER) et + 72 M€ pour les organismes de recherche (+ 1,38 % en moyenne). Comme la somme des augmentations annoncées dépasse largement les 191 M€, on peut penser que certaines de ces augmentations pourraient ne pas concerner l’ESR … Mais il est possible d’obtenir des progressions à deux chiffres : + 12,7 % pour les OSI (pour faire bonne figure avec les partenaires étrangers), + 100 % pour les CPER (pour calmer les régions après le coup de massue de 2015) et forte augmentation du budget de l’ANR (car le message du taux de succès intenable – à moins de 9 % – est parvenu jusqu’au président Hollande). Hélas, pour les priorités portées par la communauté scientifique et défendues par le SNCS, le bilan est moins flatteur.

Dans l’augmentation de 72 M€ du budget des organismes de recherche, 65 M€, c’est-à-dire la quasi-totalité, sont consacrés aux mesures salariales. Les deux tiers en seront consommés par l’augmentation de 1,2 % du point d’indice. Il restera 20 M€ pour les revalorisations salariales dans les cadres du RIFSEEP et du protocole PPCR. Cela représente en moyenne une augmentation de salaire de 0,5 %, sans commune mesure avec le déclassement que subissent les personnels de l’ESR par rapport au reste de la fonction publique (FP). A titre d’exemple, les chercheurs et les enseignants-chercheurs perçoivent, en moyenne, entre 2147 et 2984 € brut de moins par mois que les autres catégories de cadres supérieurs de la fonction publique‡. Le projet de budget 2017 leur promet une augmentation comprise entre 15 et 25 euros : c’est sérieux ? Ce différentiel est d’autant moins compréhensible que les chercheurs et les enseignants-chercheurs présentent le niveau de qualification le plus élevé de la FP. Cette situation est en complète contradiction avec la volonté affichée de revaloriser le diplôme de doctorat.

L’emploi scientifique est LA priorité de la communauté scientifique. Les gouvernements sont parfaitement conscients de cet enjeu même s’ils sont incapables de prendre les mesures nécessaires pour empêcher une catastrophe humaine et scientifique. Dans le budget 2017 de la recherche, 3 M€ sont affectés au CNRS (2,5 M€) et à l’INRIA (0,5 M€) pour permettre de recruter 400 chercheurs pour 280 départs à la retraite (à comparer avec la baisse de 967 équivalents temps plein travaillé de titulaires au seul CNRS entre 2008 et 2014). Ces postes de titulaires s’adressent à des jeunes chercheurs en situation de précarité. Trois millions d’euros, 0,3% de l’augmentation du budget 2017 de l’ESR pour l’emploi scientifique et les jeunes chercheurs précaires, la grande classe ! Ce sont 6000 postes de titulaires qu’il faudrait créer chaque année dans l’ESR pendant 10 ans pour résorber la précarité et atteindre l’objectif de 3% du PIB consacré à la R&D, fixé par le Conseil européen de Barcelone en 2002 …

Indépendamment de l’enveloppe globale attribuée à l’ESR, le gouvernement refuse toujours de revoir la priorité aveugle qu’il accorde au financement par appel à projets : + 49 M€ (+8,3 %) pour l’ANR en crédits de paiement et + 118 M€ (+ 20%) en autorisation d’engagement signifient (en principe) la possibilité d’augmenter de 20% le nombre de projets acceptés par l’ANR en 2017. Mais rien n’est prévu pour les dotations des établissements et des unités de recherche. Bien entendu, le taux de succès à l’ANR était tombé si bas que la situation était intenable pour le politique. Mais il serait autrement plus efficace d’augmenter directement les financements des organismes de recherche. En effet, le système d’appel à projets est particulièrement inadapté pour financer la recherche fondamentale et risquée : il fait perdre du temps à tout le monde, conduit à des choix arbitraires et répand la frustration chez les personnels de l’ESR. Les universités et les organismes savent, eux, organiser la recherche fondamentale et risquée de façon efficace : ils sont faits pour cela. L’arbitrage absurde et têtu en faveur du financement par appel à projets, sous-jacent à l’annonce du président Hollande que le taux de succès à l’ANR tendrait vers 14 % en 2016 et 20 % en 2017, est finalement en complète contradiction avec le transfert au début du quinquennat de 50 M€ de l’ANR vers les organismes de recherche … Un quinquennat pour rien !

Ce budget « extraordinaire » avec 191 M€ supplémentaires pour la recherche, montre que des augmentations à deux chiffres sont possibles, pour les priorités qui arrangent le gouvernement … Après cela, il ne reste que des miettes pour les priorités partagées par la communauté scientifique : 20 M€ pour la politique salariale de l’ESR (+0,5%), 3 M€ pour l’emploi scientifique (+0,07% de la masse salariale) et rien pour les dotations des organismes et des unités de recherche. Le SNCS appelle tous les personnels de l’ESR à se mobiliser pour revendiquer un autre budget de l’ESR, à la hauteur des enjeux.

https://sncs.fr/Avis-sur-le-budget-RECHERCHE-2017

‡ Rapport annexé au projet de loi de finances pour 2015 sur l’état de la fonction publique et les rémunérations (page 112)
http://www.fonction-publique.gouv.fr/files/files/statistiques/jaunes/jaune2015_fonction_publique.pdf


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