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Arnaque, mensonge et escroquerie dans la présentation d’un budget très médiocre. (06/10/09)

mmSNCS-FSU5 octobre 2009

Nous disposons de trois documents pour analyser le budget, en attendant sa version imprimée : (i) Celui de la « Mission interministérielle » voir http://www.budget.gouv.fr/presse/dossiers_de_presse/plf2010/politiques_publiques/recherche.pdf) ; (ii) Le diaporama de V. Pécresse (VP) du 1er octobre (qui est sur le site du ministère et en document joint « diaporama » ; (iii) Les communiqués de l’AEF, les plus fiables, car ils distinguent, contrairement aux précédents documents, les autorisations d’engagement (AE) et les crédits de paiement (CP) (note 1).

Le budget en résumé

1- Acquis du mouvement du début d’année, il est confirmé qu’il n’y aura pas de suppression d’emplois en 2010. Mais pas de créations : tout se développera donc en CDD ou heures supplémentaires.

2- Sans tenir compte du plan de relance de cette année, les crédits budgétaires de la « MIRES » (note 2) passent de 24,1 Mds€ en 2009 à 24,81 en 2010 soit une progression de 710 millions, 2,9 %. Toutefois cette croissance inclut 130 millions affectés aux retraites, ce que nous n’avons jamais préceédemment décompté car correspondant à un redéploiement interne du budget de l’Etat. La croissance budgétaire réelle est donc de 580 millions, soit 2,4 %, c’est-à-dire un peu plus que les 2 % de croissance du PIB en euros courants prévue par le gouvernement. Mais ce n’est pas avec cela qu’on rattrapera notre retard. Dans le même temps, le Crédit d’impôt recherche (CIR) s’accroît de 565 millions.

3- La présentation ministérielle omet le fait que, dans le plan de relance, 1,5 milliard du CIR de 2010 ont déjà été payés par anticipation en 2009, d’après la déclaration de Valérie Pécresse à l’Assemblée nationale (vous pouvez vérifier ici. Avec le plan de relance, la croissance du Crédit d’impôt est donc de 2,065 milliards. Du fait de sa réforme de 2008 (30 % des dépenses de recherche de l’entreprise, sans évaluation), pratiquement le CIR est doublé. La croissance de la MIRES ne représente donc moins du tiers de celle du CIR en 2010.

4- Y a-t-il d’autres vraies ressources pour les universités et les organismes que la MIRES. Pour le document interministériel (1), « s’ajoutent à cet effort des financements innovants en faveur de l’immobilier des universités : les partenariats public-privé (PPP) (note 3) pour 421 millions d’euros et les produits financiers destinés à l’opération « Campus » (note 4) pour 164 millions d’euros ». Quoi qu’on pense par ailleurs du Plan campus, on peut considérer les 164 millions comme de vraies ressources. Par contre compter les PPP, qui sont des emprunts dont on n’a pas commencé à payer les intérêts, intérêts qu’on nous décomptera, à juste titre, dans les prochains budgets, c’est se moquer du monde. C’est aussi futé que si vous additionniez votre salaire et vos emprunts, pour calculer vos revenus. On peut à la limite considérer les PPP comme des Autorisations d’engagement, en aucun cas comme des CP. Mais en comptant les PPP comme CP, cela permet aussi d’accroître, mensongèrement mais fortement, « les dépenses par étudiant ».

La présentation : une grande patouille indigne d’une démocratie. De ce qui précède, on peut affirmer que le budget 2010 de l’enseignement supérieur et de la recherche sera, au mieux, très médiocre. Mais pour le grand public, à moins que les médias fassent leur travail de dévoilement, tout est manipulé pour que nous paraissions crouler sous les milliards. Comme d’habitude avec Pécresse.

D’entrée, le document ministériel (1) annonce la couleur : « La mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » (MIRES) constitue la première priorité budgétaire du Gouvernement. L’ensemble des moyens alloués à ce secteur progresse de plus de 1,8 milliard d’euros en 2010, conformément aux engagements pris ». Tout le document (1) et le diaporama (2) vont être magouillés pour démontrer qu’il en est bien ainsi. Pour obtenir le « bon » résultat, le ministère, comme d’habitude, additionne les chapeaux et les lapins, le Crédit d’impôt et les crédits budgétaires, les dotations de l’Etat et les emprunts PPP, des CP et des AE, les crédits du ministère et ceux provenant d’autres ministères. Le diaporama (2) mélange les évolutions sur un an et celles sur les années à venir, tantôt en différence, tantôt en « cumulé » (ça fait plus riche), pour noyer le lecteur dans les chiffres. On croule sous les millions, mais il faut lire la dépêche de l’AEF pour savoir comment la MIRES évolue en CP et en AE : ça, qui est le plus important, ce n’est pas dans le diaporama. Et pour cause : cela montrerait que la vraie MIRES n’augmente, au mieux, que de 710 millions et non de 1,8 milliard comme affirmé. Cela ne s’appelle pas une arnaque, un mensonge, une escroquerie, mais de la communication (note 5) !

L’emploi et les carrières

Le budget confirme l’acquis du mouvement de cette année : il n’y aura pas de suppressions d’emplois, mais des transferts : en 2010, « l’effectif des emplois État s’élève à 53 513 équivalents temps plein (contre 120 010 ETP (note 6) en 2009) et celui des emplois des opérateurs (universités, organismes) à 203 561 équivalents temps plein (contre 143 127 ETP en 2009). Ce différentiel correspond au transfert de la masse salariale vers les établissements autonomes. Au total, 94 782 emplois seront transférés aux universités dans le cadre du passage aux compétences élargies, dont 60 607 en 2010 ».

Pour les personnels, 263 millions sont prévus afin « d’améliorer les carrières », pour une masse salariale concernée autour de 10 milliards.

 130 millions sur les retraites, déjà évoqués,

 52 millions pour les « augmentations de salaires » (« augmentations » fonction publique …),

 55 millions pour le chantier « carrières » pour environ 150 000 agents, soit une augmentation moyenne de 5 pour mille, à comparer au milliard pour les traders de la BNP. Mais, nous sommes très favorisés par rapport au million d’étudiants qui se partageront 33 millions d’euros, euros courants bien sûr.

Toutefois, il faut observer que ces « chantiers carrières » comportent deux aspects très différents :

 un système de primes qui sera en partie prélevé sur les vitesses de passages de grades ;

 une amélioration réelle du début de carrière des MC, autre acquis du mouvement du début 2009, qui « pèse » peu aujourd’hui (cela ne joue que sur les nouveaux), mais qui sera important à terme.

Un budget RGPP, ensérant les établissements dans un carcan

Il faudra avoir le budget imprimé et détaillé pour avoir une idée des crédits, notamment de recherche. De ce qui ressort des documents, les moyens globaux (avec salaires) des organismes devraient augmenter de 2,5 % (2,2 % sans les retraites). Si cela est exact, les crédits des laboratoires devraient varier globalement peu, mais différentiellement. En effet, au-delà de sa stagnation, ce budget manifeste une prise en main totale du pouvoir sur les établissements, sous couvert « d’indicateurs » qui oscillent entre le scandaleux et le débile. Les objectifs affirmés du budget sont :

 « la mise en place d’un modèle objectif et transparent d’allocation des moyens aux universités qui permette (…) d’introduire un mode de financement fondé sur la performance  » ;

 « le renforcement de la logique de financement sur projets de la recherche [ce qui est contraire à l’engagements de VP de rééquilibrer les crédits de base et ceux sur projet] ; en outre, les dotations en crédit aux unités de recherche lors de l’établissement des budgets 2010 des organismes de recherche devront être directement liées à l’évaluation de la performance » ;

 « accompagner la réforme des organismes et structurer le paysage de la recherche en instituts et alliances en phase avec la Stratégie nationale de recherche et d’innovation (SNRI) » , à savoir l’étroite conformité aux priorités gouvernementales ;

 « valoriser l’excellence des laboratoires à travers les contrats signés avec leurs organismes de rattachement, le soutien de base qui leur est attribué, et la mise en place des chaires organismes-universités »,

 « L’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Aeres), poursuivra son analyse de la qualité de la recherche et de la formation assurées par les établissements et leurs unités ».

Notes sur le vocabulaire
1- Les Autorisations d’engagements (AE) sont des sommes que les opérateurs sont autorisés à engager. Les Crédits de paiement (CP) sont les sommes que l’Etat déboursera réellement au cours de l’exercice budgétaire de l’année. L’Etat couvre souvent les AE par des CP au cours des années ultérieures, mais pas toujours.

2- Innovation linguistique cette année, il y a deux « MIRES », prenez le temps de comprendre car la différence entre les deux est de plus d’un milliard. La vraie MIRES (que nous appellerons N°1), « Mission interministérielle pour la recherche et l’enseignement supérieur », est un volet officiel de la LOLF (loi organique relative aux lois de finances) qui donne lieu à un document officiel, chiffré, voté par le Parlement ; elle est purement budgétaire. Pour sciemment brouiller les pistes, le gouvernement a créé cette année un nouveau concept : « La mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » » qu’il appelle aussi MIRES (voir citation dans le § 2 de ce texte). Cette MIRES (N°2 pour nous) s’écrit à deux petits mots près comme la première, mais avec des guillemets en plus autour de « Recherche et enseignement supérieur ». Elle inclut la MIRES (N°1) à laquelle s’additionne le Crédit d’impôt, les PPP, le Plan Campus, des crédits d’autres ministère, etc. Et c’est comme ça que la fausse MIRES (N°2) est présentée comme augmentant de 1,8 milliards, alors que la vraie MIRES (N°1), votée par le Parlement, n’augmente que de 710 millions. Pour le document complet de la MIRES N°2, cliquez ici http://www.budget.gouv.fr/presse/dossiers_de_presse/plf2010/politiques_publiques/recherche.pdf) ;.

3-Les Partenariats public-privé (PPP) consistent à sous-traiter au secteur privé le financement, la conception, la construction et la grande maintenance de bâtiments neufs ou rénovés. En contrepartie, l’Etat s’engage à leur verser des loyers pendant une période de 28 ou 30 ans.

4- Le Plan campus concerne 12 campus dits « d’excellence » (en fait des sous-entités limitées de chaque campus). Il est financé par les intérêts des 5 milliards provenant de la vente d’actions EDF.

5- Autre petit exemple minable du mépris pour les scientifiques, les journalistes et les parlementaires : l’an dernier nous avons eu beaucoup de mal à expliquer que le budget du CNRS n’augmentait que de 1% alors que diaporama du ministère pour le budget 2009 (transparent 24) indiquait fièrement + 4,6 %. Eh bien cette année, pour bien montrer que le budget 2010 est meilleur que celui de 2009, vous apprenez dans le diaporama 2010 (transparent 20) que l’an passé le budget du CNRS n’a augmenté que de 1,1 %. Cela ne s’appelle pas une arnaque, un mensonge, une escroquerie, mais de la communication !

6- Dans les documents budgétaires, on parle désormais en ETP (équivalents temps plein), officiellement pour décompter correctement les temps partiels. En fait pour qu’on ne puisse plus distinguer entre précaires et statutaires.



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